Le Journal de Montreal

Acculé à la faillite, il risque de perdre son emploi

L’employé du Bureau du surintenda­nt des faillites est poussé... vers la faillite

- ANTOINE LACROIX

Forcé de faire faillite à cause des répercussi­ons du système Phénix, un fonctionna­ire fédéral devrait perdre son emploi dans les prochains mois parce qu’il est chargé d’enquêter sur... les faillites.

« C’est un énorme cercle vicieux qui ne fait qu’empirer. Avant Phénix, tout allait bien. J’avais une super bonne cote de crédit, pas de dettes. Ç’a chamboulé ma vie au complet », soupire Éric Drouin, un fonctionna­ire qui travaille pour Innovation, Sciences et Développem­ent économique Canada, où il enquête sur des faillites frauduleus­es.

Depuis le fiasco de l’implantati­on du système de paie Phénix il y a trois ans, rien ne va plus pour l’homme de 40 ans, tout comme pour des milliers d’autres fonctionna­ires au pays.

Le père de famille a été forcé d’arrêter le travail quelques mois en février 2017, tant la pression du stress et des dettes était forte.

Il n’avait pas été payé pendant six mois.

Puis il a reçu quelques chèques.

« Mais la vérité, c’est que mes problèmes n’ont jamais été finis, avoue Éric Drouin, qui se sent abandonné. J’ai fait un retour au travail en mars 2018. Depuis ce tempslà, on ne cesse de me réclamer des trop-perçus, mais je ne sais pas tous d’où ils sortent. C’est tellement compliqué avec Phénix.»

À LA CENNE PRÈS

Le gouverneme­nt lui a notamment réclamé en février plus de 12 700 $ à cause de ses arrêts de travail.

« Je m’y attendais, sauf que j’aurais signé une clause qui aurait fait en sorte que je travaille deux ans de plus, mais comme la lettre est arrivée avec plusieurs mois de retard, j’étais hors délai. À la place, on m’a annoncé qu’on coupait mes 110 prochaines paies de 116 $. Quand tu vis à la cenne près, c’est très dur », laisse-t-il tomber.

Le gouverneme­nt lui aurait signalé à trois reprises, entre août 2018 et juin 2019, qu’il devait rembourser des montants entre 900 $ et 3000 $.

FAILLITE

« La première fois, je leur ai dit de prendre d’un coup ce qu’ils devaient, soit pratiqueme­nt l’équivalent d’une paie, pour mettre ça derrière moi. Mais on m’arrivait toujours avec des montants en plus », raconte-t-il.

Éric Drouin a entrepris à contrecoeu­r en mai des démarches pour une propositio­n de créancier et déclarer faillite.

« J’en ai parlé à mon patron, qui me dit que je pourrais perdre mon emploi au Bureau du surintenda­nt des faillites, à cause de la possibilit­é de conflit d’intérêts. Je comprends, mais sans Phénix, on n’en serait pas là », déplore-t-il.

Depuis, on lui aurait dit qu’on tenterait de le replacer à un autre poste dans la fonction publique, mais il vit dans l’incertitud­e, ne sachant pas quoi faire pour la suite.

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PHOTO ANTOINE LACROIX Le fonctionna­ire fédéral Éric Drouin se sent laissé à lui-même devant les problèmes du système de paie Phénix.

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