Le Journal de Montreal

Un dur coup pour la liberté de presse

- SARAH BÉLISLE

OTTAWA | La Cour suprême a rejeté hier l’ultime appel d’un journalist­e de Vice Media, l’obligeant ainsi à remettre à la police fédérale ses échanges avec une source. Un dur coup pour la liberté de presse, s’inquiètent plusieurs. Ben Makuch et

Vice se battaient depuis des années dans l’espoir de faire casser une ordonnance les sommant de remettre à la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC) les correspond­ances du journalist­e avec Farah Shirdon.

Ce Canadien soupçonné d’être impliqué auprès du groupe armé État islamique en Syrie a fait l’objet d’une série d’articles de M. Makuch en 2014.

Dans une décision unanime, la plus haute cour du pays a jugé hier que l’ordonnance était raisonnabl­e. Parmi les nombreuses raisons invoquées, ils sont d’avis que l’intérêt de la société à ce que le crime soupçonné fasse l’objet d’une enquête, puis que son auteur soit poursuivi prévaut sur les droits de la presse. D’autant plus qu’il s’agit d’infraction­s graves liées au terrorisme.

« JOUR SOMBRE »

« C’est un jour sombre pour la liberté de la presse, pourtant un des principes de base de la démocratie. Bien que nous ayons perdu cette bataille, rien ne pourra ébranler notre conviction que la liberté de la presse est essentiell­e pour avoir une compréhens­ion juste du monde dans lequel nous vivons », a réagi la porte-parole de Vice, Feriel Rahli.

Une déception partagée par la Fédération profession­nelle des journalist­es du Québec (FPJQ).

« Nous croyons que ce jugement va affaiblir la liberté de presse au pays, puisqu’il donne le droit à des corps de police de fouiller, sous certaines conditions, dans les notes de journalist­es pour arriver à leurs fins », a indiqué son président Stéphane Giroux.

« Les journalist­es ne travaillen­t pas pour la police. C’est important pour maintenir la confiance du public, pour rappeler l’indépendan­ce des médias à l’égard des pouvoirs publics et pour que les sources ellesmêmes [...] continuent de se confier aux journalist­es en n’ayant pas la crainte que la police ensuite pourra mettre la main sur certaines informatio­ns », a plaidé Jean-Thomas Léveillé, vice-président de la FPJQ.

Si M. Makuch refuse de remettre les captures d’écran de ses échanges à la GRC, il s’expose à une accusation d’outrage au tribunal qui pourrait le mener en prison. Il n’a pas donné suite à nos demandes d’entrevue hier.

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BEN MAKUCH Journalist­e

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