Haïr les Juifs à mort
Une amie m’a téléphoné samedi pour m’annoncer ce qui venait de se passer à la synagogue Tree of Life (quelle ironie) à Pittsburgh, ajoutant « vat-on apprendre que le tueur est musulman ? Non. Ce sera un antisémite suprémaciste blanc. »
Pas besoin d’une boule de cristal pour prédire que le climat de haine aux États-Unis se transformerait en bains de sang. Manifester à Charlottesville en scandant « les Juifs ne nous remplaceront pas » n’a pas la portée d’un AR-15.
GAUCHE, DROITE
La haine existe à gauche et à droite.
Ilhan Omar, membre de la Chambre des représentants du Minnesota et candidate démocrate au Sénat, qui offre aujourd’hui ses condoléances à la communauté juive de Pittsburgh, écrivait il y a quelques années : « Israël a hypnotisé le monde, puisse Allah réveiller le peuple pour l’aider à voir sa méchanceté. »
La candidate démocrate socialiste vedette Alexandria Ocasio-Cortez a commenté un « massacre » de civils palestiniens à Gaza en mai dernier, alors que le Hamas confirmait que 50 des 60 victimes d’une bataille avec l’armée israélienne étaient ses propres agents.
Hier en Angleterre, la baronne Jenny Tonge (libéraux-démocrates) twittait qu’Israël était responsable de la haine des Juifs, avant de retirer son message, craignant d’être expulsée de la Chambre des lords. Elle n’en était pas à ses premières frasques : elle tient les Juifs responsables de l’Holocauste.
Facebook, entre-temps, refuse de suspendre le compte de Louis Farrakhan, leader antisémite du mouvement suprémaciste noir Nation of Islam, qui ironisait récemment « je ne suis pas antisémite, je suis anti-termite. »
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Cette haine s’est même retrouvée sur la page Facebook d’un résident de Rosemont cette semaine quand Robert Gosselin a menacé de tuer « toute une école de filles juives » (sic). Il a été arrêté grâce à la vigilance d’internautes.
Mais on parle peu de cela. Jusqu’à ce que survienne une catastrophe.
J’ai moi-même cessé d’écrire sur les Juifs et sur Israël, car en voulant combattre l’antisémitisme, j’avais l’impression d’en créer encore plus. Les commentaires avaient de quoi rendre malade. Surtout dans un univers médiatique où les sympathies penchent pas mal toutes du même côté.
Comme le soulignait Richard Martineau dans son courageux texte Racisme à géométrie variable : « Sur la balance de l’indignation des médias, l’islamophobie pèse beaucoup plus lourd que l’antisémitisme. »
TRUMP TROP MOU
Le massacre de 11 Juifs à Pittsburgh a ceci de singulier qu’il allie antisémitisme et islamophobie. Ce que l’on sait du présumé tireur, Robert Bowers, indique qu’à ses yeux, Donald Trump n’est pas assez ferme sur l’immigration. Il croit que les Juifs font entrer des masses d’étrangers aux États-Unis dans le but d’affaiblir le pays et d’en prendre le contrôle. « Ouvrez vos yeux ! Ce sont les sales Juifs qui amènent les sales musulmans dans le pays », écrivait-il en ligne.
Il ne pouvait ignorer que ce samedi avait été désigné Shabbat des réfugiés dans 270 synagogues américaines, dont celle de Pittsburgh. Une journée de réflexion nationale sur un sujet que les Juifs ne connaissent que trop bien.
L’occasion était trop belle, sa haine trop vive. Le silence face à l’antisémitisme trop grand.
Il ne pouvait ignorer que ce samedi avait été désigné Shabbat des réfugiés dans 270 synagogues américaines, dont celle de Pittsburgh