Le Journal de Montreal

Après l’usine de pot, la prison

Des peines de deux ans de détention pour deux employés d’une serre « industriel­le » de marijuana à Mirabel

- ERIC THIBAULT

Deux jeunes employés d’un réseau de production « industriel­le » de cannabis illicite, dont le patron a été tué par balles à Montréal, devront croupir en prison pendant deux ans.

Alexandre Desroches, 27 ans, et Mathieu St-Cyr, 26 ans, ont récemment écopé de cette peine au palais de justice de Saint-Jérôme, quelques semaines avant que l’on voie des milliers de Québécois faire la file pour se procurer du cannabis en vente légale dans des succursale­s d’une société d’État.

Les deux résidents des Laurentide­s et 11 complices avaient été cueillis dans l’opération policière Champignon, baptisée ainsi parce que l’« usine » de pot du réseau était aménagée à l’intérieur d’un entrepôt ayant déjà abrité une entreprise qui cultivait des champignon­s, à Mirabel.

UNE « SUPER SERRE »

L’Escouade régionale mixte de lutte au crime organisé Laurentide­s-Lanaudière avait saisi 4427 plants et 3000 kg de marijuana en vrac lors d’une perquisiti­on dans ce vaste bâtiment de la rue Charles, en février 2015.

Une experte de la Sûreté du Québec, Suzanne De Larocheliè­re, a témoigné que cette super serre sophistiqu­ée à la « production industriel­le » comptait parmi les « plus imposantes » qu’elle a vues dans sa carrière.

On y avait aménagé cinq salles de production protégées par un système de verrouilla­ge magnétique et une salle de séchage dotée de deux thermopomp­es. L’endroit était alimenté avec de l’électricit­é détournée des compteurs d’Hydro-Québec. Des dizaines de lampes et de ventilateu­rs y étaient installés.

PAYÉ 20 $ L’HEURE

Les « jardiniers » du réseau y avaient même leur cuisine et bénéficiai­ent d’un service de navette pour les conduire au boulot.

St-Cyr, le cousin de la conjointe du « boss » de l’organisati­on, Martin Garand, a admis devant les policiers qu’il y avait travaillé pendant quatre mois. Il recevait un salaire de 20 $ l’heure, à raison d’une vingtaine d’heures par semaine.

On lui avait confié une clé de cet entrepôt « abritant plus de 1 million $ de cannabis et d’équipement­s », signe qu’il n’était pas qu’un simple exécutant, mais bien un « homme de confiance » du réseau, d’après la juge Nancy McKenna. Quant à Desroches, il veillait à l’entretien des boutures, soit les plants « bébés ». Son père, qui était un oncle du patron Garand, travaillai­t lui aussi pour cette organisati­on et a écopé de 30 mois de pénitencie­r.

DANGEREUX

La juge McKenna a d’ailleurs insisté sur les « dangers inhérents » aux mégacultur­es de pot du marché noir et à « la criminalit­é qui en découle », en évoquant le sort de la tête dirigeante de ce réseau.

Quatre mois après son arrestatio­n, Garand, 43 ans, a plaidé coupable et a été condamné à 35 mois de pénitencie­r. Moins d’un an plus tard, il était libéré et assigné en maison de transition avec des conditions à respecter, à Montréal.

Le soir du 20 juin 2016, au volant d’un luxueux VUS, Garand venait d’aller reconduire sa fille au domicile familial à Repentigny et il rentrait à la maison de transition où il avait l’obligation de dormir, dans le quartier Pointe-aux-Trembles.

Un assassin armé qui l’attendait dans le stationnem­ent l’a abattu de plusieurs projectile­s à la tête. Ce règlement de compte n’a pas été élucidé à ce jour.

PEINE MINIMALE

La juge a condamné St-Cyr et Desroches à la peine minimale de deux ans prévue au Code criminel canadien pour production de cannabis depuis des amendement­s législatif­s adoptés en 2012 par l’ancien gouverneme­nt Harper.

Elle a spécifié que « même en l’absence d’une peine minimale », les fautifs ne s’en seraient pas mieux tirés, en raison de « l’envergure » de ce réseau et de leur implicatio­n.

 ??  ??
 ?? PHOTOS COURTOISIE ?? L’entrepôt de culture de pot de cette organisati­on, à Mirabel, comptait cinq serres et une salle de séchage, toutes protégées par un dispositif de verrouilla­ge magnétique et alimentées par de l’électricit­é détournée des compteurs d’Hydro-Québec. Les policiers y ont saisi plus de 4400 plants et 3000 kg de cannabis, le 2 février 2015.
PHOTOS COURTOISIE L’entrepôt de culture de pot de cette organisati­on, à Mirabel, comptait cinq serres et une salle de séchage, toutes protégées par un dispositif de verrouilla­ge magnétique et alimentées par de l’électricit­é détournée des compteurs d’Hydro-Québec. Les policiers y ont saisi plus de 4400 plants et 3000 kg de cannabis, le 2 février 2015.
 ??  ?? MARTIN GARAND Assassiné
MARTIN GARAND Assassiné

Newspapers in French

Newspapers from Canada