Ils doivent payer 400 000 $ à cause de la cachotterie d’une courtière
Un couple est au bord du gouffre financier. Tout ça parce qu’une courtière immobilière ne leur a pas dit que le sol de la maison qu’ils achetaient pouvait être contaminé par le mazout.
«C’est une bataille sans fin. On n’en voit pas le bout», souffle Irith Lebovich.
Elle et son conjoint, David Senbel, ont englouti environ 400000$ depuis l’achat de leur maison, il y a six ans. C’est presque autant que le prix d’achat de 430000$ de cette coquette résidence de la rue Dufferin, à Hampstead, une petite ville enclavée dans Montréal.
Tout ça pour régler des problèmes de moisissures et, surtout, pour faire décontaminer un sol imbibé de mazout.
Le couple en veut aussi à l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier (OACIQ), dont le mandat est de protéger le public. Il attend depuis plus d’un an la décision du comité de discipline à l’égard de la courtière qui lui a vendu la maison. Selon eux, elle savait qu’un problème de sol contaminé était possible, mais n’en a rien dit.
SURPRISE SOUS LE GARAGE
Le couple estime avoir payé près de 200000$ sur le demi-million qu’a coûté la décontamination, le reste étant assumé par l’assureur. En plus d’un autre montant de 200 000 $ dépensé en frais d’avocats et en rapports d’experts pour ce qu’il considère comme un vice caché.
C’est un bête problème d’infiltration d’eau qui a mené à la découverte de la contamination. En enlevant le gypse dans le garage, ils ont vu une fissure si large qu’ils pouvaient y insérer un bras.
Un expert a alors demandé de percer un trou dans la dalle du garage pour prélever un échantillon. C’est là qu’on a senti une forte odeur de mazout. La fuite provenait du réservoir enfoui du voisin.
Il s’agit d’un problème grave, mais pas unique. David Senbel et Irith Lebovich intentent alors un recours contre les anciens propriétaires pour vice caché.
L’histoire prend une tout autre tournure en 2011 quand ils apprennent de voisins qu’Anita Benabou, la courtière immobilière qui leur a vendu la maison, connaissait le risque de contamination.
Mais elle se serait bien gardée de les prévenir. En fait, c’était elle qui était aussi chargée de la vente de cette maison à d’autres acheteurs en 2008.
À ce moment-là, un rapport d’inspection soulignait la possibilité d’une contamination aux hydrocarbures, plusieurs maisons du quartier ayant eu ce problème. L’inspecteur suggérait de s’assurer de la qualité du sol. Et parlait de problèmes de moisissures.
Les acheteurs de l’époque avaient préféré se désister plutôt que de risquer de se retrouver avec des problèmes.
PETITE INDEMNISATION
Le couple a depuis ajouté la courtière à la liste des personnes qu’elle poursuit pour vice caché. Il a aussi déposé une plainte à l’OACIQ. L’organisme détient des pouvoirs d’enquête et de discipline comme ceux d’un ordre professionnel. En octobre 2014, le comité d’indemnisation de l’OACIQ accorde le maximum permis de 15 000 $ pour dédommager le couple. On est loin du compte, mais il est rare que le comité donne raison aux clients. En 2013, le comité a accepté six demandes d’indemnisation sur 107. «La courtière a oeuvré de façon que les réclamants ne soient pas informés du problème concernant la potentielle contamination du sol», conclut le comité. L’OACIQ estime «invraisemblable que la courtière ait pu accepter d’annuler cette promesse d’achat sans se renseigner sur les motifs de cette annulation.» Surtout que l’annulation lui faisait perdre sa commission. Trois mois après la sentence, M me Benabou n’a pas remboursé l’OACIQ, comme l’exige l’organisme.
«Tout est entre les mains des avocats. Je n’en sais pas beaucoup plus, sinon qu’aucune décision n’a encore été rendue en cour», a-t-elle dit au Journal .