Le Journal de Montreal

QuAnd les poliCiers font les Clowns

- MAtHIEu BOCK-CôtÉ mAthieu.bock- cote@quebecorme­diA.com

on le sait, le projet de loi sur les retraites des employés municipaux du gouverneme­nt Couillard provoque de vives réactions. il est pourtant nécessaire.

Quoi qu’en disent les leaders syndicaux, de tels régimes ne sont plus tenables et handicaper­ont cruellemen­t les plus jeunes au bénéfice exclusif d’une génération blindée, surprotégé­e, qui a négocié à une autre époque des avantages sociaux qui ne tiennent plus aujourd’hui.

Comme tous les autres employés municipaux, les policiers sont en colère et sont portés à prendre des moyens de pression. La chose est pourtant plus compliquée avec eux. Je ne suis pas l’ennemi de la police. Au contraire. À la différence de ceux qui n’en peuvent plus des «boeufs», qui vomissent toujours sur les flics, en les imaginant systématiq­uement portés à la brutalité, je crois leur rôle civilisate­ur. une fonction politique et sociale. On les appelle souvent les gardiens de l’ordre. Car c’est ce qu’ils sont. Pour cela, ils doivent être aisément identifiab­les. Pour cela, ils portent l’uniforme, qui confirme, aux yeux des citoyens, leur autorité.

Mais cet immense pouvoir a une contrepart­ie: ils doivent être à la hauteur de leurs fonctions. Ils ne sont pas des employés comme les autres. Surtout, ils ne doivent pas abîmer les symboles de leur autorité, parce qu’ils l’incarnent. Et puisqu’ils sont non seulement les gardiens de la loi, mais aussi les représenta­nts de la force publique, ils sont appelés à un devoir d’exemplarit­é et à un surplus de savoir-vivre.

C’est pourtant à ce devoir qu’ils font défaut lorsqu’ils décident de se promener en treillis militaire. C’est aussi ce qu’ils font lorsqu’ils bariolent leur voiture pour protester contre le projet gouverneme­ntal ou lorsqu’ils dissimulen­t un arrêt de travail massif derrière des congés de maladie. De même, lorsqu’ils s’approprien­t un symbole contestata­ire comme le carré rouge, on aura le choix d’y voir une manifestat­ion d’inconscien­ce ou une provocatio­n pure et simple.

rEPrÉsENtA­Nts DE LA FOrCE PuBLIquE, ILs sONt APPELÉs À uN DEvOIr D’ExEMPLArIt­É

Plus encore, la majorité de la population entretient un préjugé favorable envers eux. Avec raison. L’hostilité systématiq­ue envers la police relève moins de l’esprit critique éclairé que d’une mentalité post-adolescent­e exaspérant­e qui cherche en toutes circonstan­ces à confronter l’autorité légitime. Comme si c’est ainsi qu’on se prouvait qu’on existe. Pourtant, un monde sans policiers ne serait pas plus libre, mais anarchique.

un DEVoir D’ExEmplArit­É

Les policiers exercent un pouvoir singulier: la violence légitime. Ils sont les seuls, dans la société, à pouvoir en faire usage. C’est un pouvoir immense, un privilège considérab­le. Ils occupent

CrÉDiBilit­É minÉE

Mais peut-être est-ce inévitable? L’esprit public, aujourd’hui, a tendance à se décomposer en factions. Chaque groupe est davantage attaché à ses avantages particulie­rs qu’au bien commun. Et puisque le sens de l’honneur attaché aux différents métiers s’efface la plupart du temps devant les avantages matériels que chacun procure, on voit mal pourquoi les policiers fonctionne­raient autrement.

Mais quand les policiers font les clowns, ils ne ruinent pas seulement leur réputation. Ils minent la crédibilit­é des institutio­ns publiques.

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