Le Journal de Montreal - Weekend
UN RÉCIT QUI ABORDE LA SOUFFRANCE DES HOMMES
Dans son dixième roman, Fracture, la comédienne, scénariste et réalisatrice Johanne Seymour a choisi d’écrire un roman noir grand public qui parle sans détour de masculinité, d’amitié et de la difficulté qu’ont les hommes à parler de leurs émotions.
Johanne Seymour raconte le parcours de trois hommes dont les vies éclatent en morceaux après la réouverture d’une enquête sur l’accident de voiture mortel de leur coach de baseball.
Ces trois hommes, amis depuis l’enfance, partagent un lourd secret : ils ont été abusés par leur coach de baseball une trentaine d’années auparavant et en subissent encore les multiples conséquences dans leur vie d’adulte. Les trois hommes meurtris pourront-ils trouver enfin le chemin de la guérison, même si les secrets et les non-dits se multiplient ?
LA SOUFFRANCE DES HOMMES
Johanne Seymour, en entrevue, explique qu’elle avait ce roman en tête depuis longtemps.
« J’ai écrit beaucoup d’héroïnes fortes et j’ai beaucoup écrit sur les femmes. Je trouve que les hommes ne sont pas à plaindre, parce qu’ils sont responsables des mauvais coups qu’ils font, mais je trouve que ce serait l’fun qu’on commence à s’occuper d’eux. »
« Je suis d’une autre génération en disant ça, mais je trouve qu’ils n’ont pas fait cette révolution qu’ils auraient dû faire pour les aider à mieux se comprendre et mieux se définir. Par les temps qui courent, je trouve que les hommes souffrent beaucoup. »
Elle a donc eu envie d’explorer cela et d’aller voir pourquoi les hommes souffrent.
« Je veux dire au monde que quand on fait mal aux hommes, c’est pas mieux que pour les femmes. Faisons attention à ce qu’on fait à nos hommes. »
L’IMPACT DES TRAUMATISMES
Johanne Seymour précise que dans le roman, il est question d’abus sur trois hommes, mais souhaite que les lecteurs découvrent ce qui s’est passé en lisant le roman.
« Les traumatismes, ça ne se guérit pas en trois secondes. Les hommes en ont, de ces traumatismes, et il faudrait commencer à regarder ce que ça leur fait, mais pas juste à eux autres. »
« Dans le roman, une enquête s’ouvre sur un accident qui a eu lieu huit ans plus tôt, dont un des gars est sorti avec un petit handicap. Une spirale infernale est déclenchée à partir de là. On comprend, dans ce roman, comment ça touche tout le monde : l’enquêteur, les gens autour d’eux, le directeur de l’école où ça s’est passé. »
Les dommages collatéraux sont énormes.
« On voit l’ampleur. Ça ne fait pas mal juste à une personne – ce qui serait déjà trop –, ça fait mal à une chaîne incroyable de monde. Honnêtement, j’aurais appelé le roman Séquelles si ma série télévisée ne s’était pas appelée Séquelles !»
UN SLOW-BURNER
L’écrivaine précise que Fracture est vraiment un roman psychologique, à la frontière du roman noir, du roman policier et de la littérature générale.
« C’est un slow-burner, comme disent les Américains. C’est à l’inverse d’un thriller. Mais c’est un roman qui est quand même un page-turner .»
Son expérience en scénarisation transparaît dans son style d’écriture.
« J’ai joué pendant vingt ans. J’ai fait énormément de théâtre. Je ne suis pas romancière, au départ : j’étais actrice, au départ. Après, j’ai écrit pour la scène, pour la télévision, et j’ai fini romancière. Ça paraît. Mes romans sont de plus en plus courts, en plus ! »
■ Johanne Seymour est comédienne, scénariste, metteuse en scène, réalisatrice et romancière.
■ Elle a fait paraître cinq polars dans la série Kate McDougall et elle a scénarisé le premier, Le cri du cerf, en une série télévisée de six épisodes (Séquelles).
■ Elle a aussi publié Rinzen, la beauté intérieure, finaliste au prix SaintPacôme du meilleur roman policier et au prix Arthur-Ellis du meilleur polar canadien en français, et
Le Goût de l’élégance (vendu à 4000 exemplaires).
■ Elle a aussi fondé le festival Les printemps meurtriers de Knowlton (2012-2016), qui célébrait la littérature policière.