Le Journal de Montreal - Weekend

DANS L’UNIVERS MUSICAL DE BIZ

- STÉPHANE PLANTE

Quand Biz a pris le micro lors des balbutieme­nts de Loco Locass, il était loin de se douter que cette prise de parole se déploierai­t en autant de facettes. Car s’il ne monte plus sur scène pour scander « Libérez-nous des libéraux », son verbe s’exprime sous forme de romans ou de chroniques à la télé et la radio. Et toutes ces incarnatio­ns n’ont jamais effacé le mélomane en lui.

Loco Locass, c’était ton premier projet musical ?

Avant Loco Locass, je jouais du drum chez nous dans le sous-sol. J’avais un ami claviérist­e. Avant même qu’on fasse notre première pratique, il avait déjà réservé un studio de photo pour prendre des photos de notre groupe qui n’avait même pas de nom !

Loco Locass, ça a commencé dans quelles circonstan­ces ?

On était à Québec avec Batlam au lendemain du référendum. Les gens étaient un peu écoeurés d’entendre parler de politique. On s’est dit qu’on pouvait parler de cette question-là, mais en renouvelan­t la forme. Essentiell­ement, on disait la même chose que Paul Piché, mais sans barbe et sans guitare. La chanson engagée au Québec était en berne depuis les années 1980. Dans les années 1990, tu as des courants plus sociaux avec Jean Leloup, Vilain Pingouin, Les Colocs. C’était engagé, mais peut-être d’un point de vue plus social.

L’album qui t’a fait découvrir le rap ?

It Takes a Nation of Millions to Hold Us Back de Public Enemy. La parole de Public Enemy portait la parole des Noirs américains. Ça m’a beaucoup touché. À l’époque, il n’y avait pas internet. On ne savait pas ce qui se passait dans les ghettos américains. C’est N.W.A. qui ont dit qu’ils étaient la BBC. Le rap, c’est le CNN des ghettos. Il y avait aussi les Beastie Boys dans un autre registre plus drôle, plus ludique.

Quel parolier ou quelle parolière t’a le plus inspiré pour les paroles politiques ?

Gaston Miron, poète de l’affirmatio­n nationale. Gilles Vigneault, qui a tellement bien nommé le Québec.

Te souviens-tu de ce que vous écoutiez comme musique au moment d’enregistre­r vos albums ?

Quand on écrivait Amour oral, Batlam et moi on avait les deux oreilles dans The Eminem Show. Dans La censure pour l’échafaud, le « flow » est très Eminem. Quand j’écrivais Sheila ch’us là j’écoutais L’école du micro d’argent d’IAM en 1998. J’étais à fond dans le rap français. Quand on a entendu Prose combat de MC Solaar, on s’est dit qu’on pouvait faire du rap en français.

Ta découverte du rap québécois, c’était avec qui ?

Un groupe qui s’appelle Complys avec C-Drik. Lui, il rappait en joual solide. Sans pression aussi rappait en joual.

Est-ce que le fait d’arrêter de composer de la musique a fait en sorte que tu écoutes la musique différemme­nt ?

Je m’ennuie du plaisir et de l’intensité que j’avais à écouter de la musique quand j’avais 14-15-16 ans chez nous dans le sous-sol à Québec. On pouvait inviter des amis pour écouter la cassette de Ride the Lightning de Metallica trois fois de suite. C’était ça l’activité. J’ai participé à La Veillée de l’avant-veille avec le groupe Le Vent du Nord. On était avec Stéphane Archambaul­t. J’étais invité à faire trois chansons du Vent du Nord avec du rap de Loco. Quand je suis monté sur scène, j’ai compris pourquoi j’avais aimé faire ça pendant 20 ans. Mais après trois tounes, j’étais déjà à moitié mort. (Rires).

Est-ce que l’écriture du rap influence encore ton écriture même si c’est pour d’autres formats ?

J’ai écrit du rap pendant presque 20 ans avec l’idée que cette écriture-là est destinée à prendre vie à voix haute. J’ai gardé une conscience de l’oralité des mots. Même pour un roman. Quand j’écrivais mon premier roman Dérive, mon éditeur Jean Barbe me corrigeait avec du gros crayon rouge en disant « arrête de faire du rap ! »

Tes projets pour les prochains mois ?

J’ai une chronique « Sport et société » avec Jean-Charles Lajoie à la radio au 91,9. J’ai ma chronique à TVA Sports encore avec Jean-Charles Lajoie. Et après ça, je traverse dans l’autre studio pour Le monde à l’envers avec Stéphan Bureau. Il y a un livre que je fais avec Claudia Larochelle. On s’adresse à des personnage­s historique­s québécois par le biais de lettres. Je suis en train d’écrire une lettre à Jehane Benoît la cuisinière. Et il faut que j’écrive une lettre à Samuel de Champlain.

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