Le Journal de Montreal - Weekend

« C’EST LE ROMAN QUI M’A APPRIS À ÉCRIRE »

Cythère

- SARAH-ÉMILIE NAULT Collaborat­ion spéciale

S’il était essentiel pour l’écrivaine Caroline Guidon de planter l’histoire de son premier roman à Berlin, c’est que cette ville dans laquelle elle a passé 5 années entrecoupé­es n’aura rien de moins que changé sa vie. Avec Cythère, elle réussit à faire honneur de façon égale à ce lieu qu’elle chérit et aux amitiés qui défient la distance et le temps.

Caroline Guindon est née à Montréal et a grandi à Sainte-Thérèse dans une famille où les émotions se transmetta­ient, notamment, par la musique. « Mon instrument était le chant, explique l’auteure de 56 ans. Dans ma famille, il y avait des éducateurs et des musiciens. Tout le monde chantait, jouait du piano. C’est par la musique classique que j’ai compris l’importance de bien maîtriser l’Allemand. »

Ayant opté pour des études en musicologi­e et non en littératur­e, elle affirme avoir, dans sa vie, tout lu par pur plaisir. Puis, à 22 ans, poussée par une passion pour les langues étrangères, elle s’est envolée pour le premier d’une longue série de voyages à Berlin. Un lieu où elle s’est fait de ce genre d’amis qui se transforme­nt en points d’ancrage.

Professeur­e dévouée, elle s’installe à Chicago pour enseigner pendant une dizaine d’années dans un Junior College.

« Vers 40 ans, c’est devenu clair pour moi ; plus on vieillit, plus c’est difficile de ne pas être complèteme­nt honnête et authentiqu­e envers soi-même. J’avais l’impression qu’il me manquait quelque chose. J’avais des besoins de créer, d’écrire. »

Si le « traumatism­e » de l’élection de Donald Trump aura secoué à la fois Chicago et sa force de tenir à bout de bras ce roman-fresque à écrire, il a cela de bon qu’il lui donne envie de tenter la forme brève de la nouvelle. Cela pour lui donner un peu de répit en s’obligeant à créer sans penser. Elle publie le recueil de nouvelles La mémoire des cathédrale­s en 2019.

ÂME SOEUR

« À force d’écrire, on apprend à mieux se connaître », ajoute l’auteure de Cythère. Un premier roman et non une autobiogra­phie, malgré les références bien personnell­es à Berlin, bien sûr, et certains détails comme la maladie du père ou la grande amitié unissant deux femmes que tout sépare.

Afin d’explorer les thèmes de la mélancolie et du deuil, l’écrivaine a imaginé Geneviève et Hannah, des personnage­s lui étant apparus de façon très claire et se faisant le miroir l’une de l’autre. Un clin d’oeil à sa propre histoire avec Ute, une Berlinoise rencontrée en 1986 devenue son âme soeur amicale depuis.

Cythère, c’est la mélancolie d’une Montréalai­se de 35 ans qui marche et vient se ressourcer à Berlin après la mort de son père. C’est une jeune femme qui se remémore des moments de sa vie, tout en se dirigeant vers des retrouvail­les, vers le début d’une vie nouvelle.

L’un de ses petits plaisirs de compositri­ce ? Alterner le passé et le présent dans une danse faisant ultimement se rejoindre les deux moments pour se tourner vers le futur.

Quant au titre Cythère, il se fait porteur de plusieurs sens en renvoyant à cette notion d’île : celle de la fresque Pèlerinage à l’île de Cythère d’Antoine Watteau, de la mère malade qui s’y est enfuie, de Berlin à l’époque où elle était entourée d’un mur dans un océan communiste et celle faisant office de refuge pour la mélancoliq­ue Geneviève, venue s’y ressourcer le temps d’une année.

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CYTHÈRE Caroline Guindon, 210 pages, Lévesque Éditeur

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