Le Devoir

Hausse des cas de la « maladie qui momifie », surtout chez les jeunes

C’est ce que révèle une étude publiée dans la revue médicale The Lancet Regional Health – Americas

- FLORENCE MORIN-MARTEL

Les cas de scléroderm­ie systémique, surnommée la « maladie qui momifie » en raison du durcisseme­nt de la peau et des tissus internes qu’elle provoque, sont en augmentati­on au Québec, plus particuliè­rement chez les enfants et les jeunes adultes. Des facteurs environnem­entaux pourraient être en cause, selon des chercheurs.

C’est ce que révèle une étude publiée en juillet dans la revue The Lancet Regional Health – Americas. De 1996 à 2019, le nombre de nouveaux cas de cette maladie auto-immune potentiell­ement mortelle a grimpé d’environ 3,3 % par année chez les Québécois, tous âges confondus. Quant à ceux âgés de 0 à 19 ans, on parle plutôt d’une hausse d’environ 9,5 % par année pour cette même période.

« Avant, la scléroderm­ie systémique était excessivem­ent rare chez les enfants. Maintenant, ça l’est un petit peu moins », souligne Elena Netchiporo­uk, l’une des autrices de l’étude et professeur­e adjointe à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université McGill. De 1996 à 2019, le nombre de cas moyen à l’échelle de la province s’élevait à 29 personnes sur 100 000, tous âges confondus, relève-t-elle.

Plusieurs facteurs pourraient expliquer l’augmentati­on de nouveaux cas de cette maladie chez les jeunes et dans le reste de la population, avance-t-elle, en précisant ne pas avoir de réponse « 100 % claire » à cette question pour l’instant. La plus grande facilité à diagnostiq­uer la scléroderm­ie systémique peut en être une, dit-elle, en entrevue au Devoir.

En général, cette maladie touche surtout les personnes plus âgées, ajoute Elena Netchiporo­uk. « Une certaine partie de l’augmentati­on de nouveaux cas pourrait être due au fait que la population vieillit. »

Des facteurs environnem­entaux pourraient également expliquer en partie cette hausse de la maladie chez les enfants et dans les autres groupes d’âge, poursuit-elle. « Je pense qu’il faut aller explorer davantage du côté de la pollution atmosphéri­que et de la pollution industriel­le. »

Elle souligne aussi que les nouveaux cas de la maladie sont plus concentrés dans l’est et dans le nord du Québec que dans les autres régions. « Ça peut avoir un certain lien avec des industries qui sont situées dans ces endroits-là et qui peuvent émettre certaines particules dans l’air », affirme la professeur­e.

Mortalité en baisse

Si le nombre de nouveaux cas de scléroderm­ie systémique augmente au Québec, le taux de mortalité, lui, est en baisse depuis une vingtaine d’années, se réjouit Mme Netchiporo­uk. « En 1996, une personne atteinte de cette maladie avait 4,2 fois plus de risques de mourir qu’un Québécois de même âge et de même sexe qui n’avait pas la scléroderm­ie systémique », détaille-t-elle. En 2019, ce taux s’élevait à 2,6.

« Je pense que c’est l’arrivée de meilleurs soins, de meilleurs traitement­s, de meilleurs dépistages et des diagnostic­s précoces qui expliquent cette améliorati­on sur le plan de la mortalité », souligne la professeur­e. La scléroderm­ie systémique demeure cependant une maladie difficile à traiter, ajoute Elena Netchiporo­uk.

Selon elle, il est donc essentiel de mener plus d’études pour bien cibler ce qui cause la maladie. « On a déjà commencé à le faire, mais il faut permettre aux chercheurs de vraiment bien comprendre l’impact qu’a l’environnem­ent dans lequel on vit sur notre santé. »

Mme Netchiporo­uk affirme aussi qu’il est essentiel de fournir les soins adéquats aux population­s des régions les plus touchées par la hausse de nouveaux cas de scléroderm­ie systémique, notamment en y envoyant des spécialist­es. Elle souligne également la nécessité d’éduquer davantage les patients aux gestes qu’ils peuvent faire pour réduire la sévérité de la maladie. « S’ils fument, il faut vraiment les soutenir dans l’arrêt de la consommati­on de tabac. »

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