Pour une gauche au service des gens
Chaque pouce que j’ai pour aider les gens, je le prends. Mais je ne me fais pas d’illusions.
Je vous dois une confession. C’est vrai que je suis impatient. Je suis habité par un sentiment d’urgence que je ne peux plus cacher. Chaque jour depuis que je suis entré en politique, ce sentiment grandit.
Nos services publics sont en train de s’effondrer sous nos yeux. Privée d’amour depuis tellement longtemps, criblée d’inégalités, l’école publique échappe des enfants malgré le dévouement inouï du personnel. C’est le plus important ascenseur social que nous avons au Québec et il est carrément en panne. Le système de santé public, autrefois une grande fierté québécoise, est si malade qu’on est rendus à le payer en double : une fois sur nos impôts, une autre fois en allant au privé. J’en parle depuis des années, mais je ne suis pas entré en politique pour en parler. Je suis entré en politique pour agir.
Nous avons une crise climatique sur les bras. Il n’y a plus d’été sans que le ciel soit teinté d’orange parce que nos forêts brûlent. Nos récoltes sèchent ou pourrissent dans les champs, et des villages sont inondés par des crues d’une ampleur qu’on n’a jamais vue. Pourtant, malgré l’urgence, la CAQ ne trouve pas encore que le transport en commun fait partie de ses responsabilités ! Les Québécoises et les Québécois se font dire de faire leur part par des gouvernements qui sont incapables de faire la leur. J’en parle depuis des années, mais je ne suis pas entré en politique pour en parler. Je suis entré en politique pour agir.
Ça fait sept ans que je suis député dans l’opposition. Il n’y a pas un jour qui passe sans que des gens cognent à la porte de mon bureau pour demander de l’aide. Une augmentation de loyer, un avis d’éviction, un frigo vide. Souvent, les trois à la fois. Mon équipe et moi faisons notre possible avec les moyens du bord. C’est possible d’aider la famille Benzaï, victime d’une éviction particulièrement sauvage, à trouver un nouveau logement. C’est possible de redonner mon augmentation de salaire pour réparer la chambre froide de la banque alimentaire du quartier. D’autres batailles se font au Parlement, comme celle de la loi Françoise David.
Chaque pouce que j’ai pour aider les gens, je le prends. Mais je ne me fais pas d’illusions.
L’an dernier, près d’un million d’entre nous, dont le tiers sont des enfants, ont eu recours à de l’aide alimentaire. Des mères de famille se présentent à nos assemblées sur le coût de la vie pour nous dire qu’elles ont beau travailler à temps plein, elles arrivent à peine à garder la tête hors de l’eau. Ça cogne de plus en plus souvent à la porte de mon bureau, et comme partout ailleurs, les moyens du bord ne répondent plus à la demande.
La gauche s’est battue pour créer les conditions de la classe moyenne au Québec. La sécurité matérielle des travailleurs et des travailleuses, c’est notre pain et notre beurre. Aujourd’hui, lorsque la classe moyenne fait ses comptes, elle se rend compte de sa fragilité. Les Québécoises et les Québécois ont raison de s’inquiéter pour leur niveau de vie, et ce n’est jamais plus vrai que pour les jeunes de ma génération en pleine crise du logement. De quoi on rêve ? De choses bien terre à terre. De maisons et de logements à un prix juste, de salaires qui paient la carte de crédit, de bonnes écoles pour nos enfants, d’un système de santé qui nous soigne rapidement et gratuitement, d’une retraite digne pour nos parents. D’un peu plus de temps pour vivre.
C’est en recréant ces conditions, pas dans quinze, trente ou cinquante ans, que nous pourrons nous remettre à rêver collectivement. Que nos ancêtres soient débarqués d’un bateau il y a 400 ans ou que nos parents aient choisi le Québec quelques années avant notre naissance, nous ne sommes pas condamnés aux divisions que certains politiciens cultivent. Nous pouvons construire un pays ensemble.
Québec solidaire a 18 ans, l’âge de la majorité. Je suis persuadé que la majorité des gens partage notre désir de changement. Je suis persuadé que la majorité des gens partage nos valeurs de justice sociale, de respect de l’environnement, d’égalité entre les genres. Plaçons leurs préoccupations au coeur de notre projet politique. Mettons-nous à leur service. Choisissons nos combats et faisons la preuve que nous serons capables de livrer la marchandise. C’est ce pragmatisme que la gauche doit se réapproprier.
Le Québec a essayé le Parti libéral, le Parti québécois et maintenant, la Coalition avenir Québec. Nous devons aux centaines de milliers de femmes et d’hommes qui ont voté pour ce parti différent, Québec solidaire, de faire la différence là où nous aurons les moyens de le faire : au gouvernement.
Mon sentiment d’urgence, je l’assume complètement. Partout à travers le monde, la gauche perd ses batailles. Chez nous, il est temps qu’elle se mette à gagner ses élections.
De quoi on rêve ? De choses bien terre à terre. De maisons et de logements à un prix juste, de salaires qui paient la carte de crédit, de bonnes écoles pour nos enfants, d’un système de santé qui nous soigne rapidement et gratuitement, d’une retraite digne pour nos parents. D’un peu plus de temps pour vivre.