Le Devoir

Des services de santé suspendus dans le Grand Nord

- ISABELLE PARÉ LE DEVOIR

Les effectifs ne suffisent plus à éviter des fermetures

JOSÉE LÉVESQUE »

Les services de santé sont suspendus jusqu’à nouvel ordre dans plusieurs villages du Grand Nord depuis cette semaine en raison d’une pénurie aiguë de personnel. La population vient d’être priée de « rester en sécurité » et de ne contacter leur dispensair­e qu’en cas d’urgence.

Le manque criant de personnel infirmier frappe de plein fouet au nord du 55e parallèle. Le Centre de santé Inuulitsiv­ik (CSI), qui gère les services infirmiers et sociaux dans sept villages de la baie d’Hudson, a récemment prévenu les résidents des villages de Salluit, Akulivik et Puvirnituq que les services infirmiers courants ne seraient plus accessible­s jusqu’à nouvel ordre. Le même sort attend la population d’Inukjuak dès la semaine prochaine, a confirmé jeudi la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik (RRSSSN).

Dans un avis diffusé à la population le 25 août, les autorités de santé pressent les résidents de « rester en sécurité » et de « ne pas prendre de risques inutiles », puisque seules les urgences pourront être traitées par ordre de priorité, et sur appel seulement.

« Les effectifs ne suffisent plus à éviter des fermetures. Les équipes de gestion et les employés travaillen­t sans

relâche à maintenir les services d’urgence, et lorsque possible les services courants », a indiqué jeudi Josée Lévesque, coordonnat­rice des communicat­ions à la Régie gérant les services de santé dans le Grand Nord.

Pénurie de personnel

Selon celle-ci, le noeud du problème demeure la pénurie criante de personnel infirmier. Pour pallier ce problème, un système complet de triage a été mis en place et les infirmiers et infirmière­s ne répondent plus qu’aux cas considérés comme « urgents ».

« On a toujours été limités en matière d’effectifs. Il y a eu des interrupti­ons trois ou quatre fois cet été. Mais là, ça a atteint un seul critique. On parle carrément de suspension des services. Que vont faire les gens avec des problèmes de diabète, ou des grossesses à risque ? Il n’y a pas de solution de rechange, pas d’autres services. La seule option, c’est prendre l’avion pour Montréal. C’est hors de portée pour les gens d’ici », a déploré une employée des services de santé, qui a requis l’anonymat par crainte de représaill­es.

Selon cette dernière, plusieurs écueils compliquen­t le recrutemen­t du personnel dans le Grand Nord, notamment les conditions de travail difficiles et une grave pénurie de logements.

De nouveaux postes ont été créés pour venir en renfort aux équipes déjà en place, mais une nouvelle directive obligeant le personnel en poste et les nouvelles recrues à partager leur logement aurait contribué au départ récent de certains employés, affirme cette employée.

La porte-parole de la RRSSSN a confirmé que la pénurie de logements était un problème généralisé et persistant avec lequel son organisati­on devait composer au quotidien. Selon la Régie, il manque à l’heure actuelle 15 infirmière­s pour pouvoir offrir des services « sécuritair­es et en continu » sur toute la côte d’Hudson.

Ne tenir qu’à un fil

L’accès aux soins de santé ne tenait déjà qu’à un fil depuis le début de l’été dans plusieurs villages de la côte de la baie d’Hudson. La réaffectat­ion de plusieurs cadres sur le terrain et le recours temporaire à des infirmière­s praticienn­es spécialisé­es ont toutefois permis de maintenir à bout de bras les services ces derniers mois, assure la Régie.

Pour attirer des effectifs, notamment du personnel infirmier, le RRSSSN a déployé une plateforme pour promouvoir les emplois disponible­s et a instauré des primes salariales ainsi que de nombreux « bonis », notamment des congés allant jusqu’à 16 semaines par année, un rôle élargi, trois ou quatre sorties annuelles, ainsi que le transport et le logement fournis par l’employeur.

Toujours selon la Régie, qui dessert tout le Nunavik, les villages situés du côté de la baie d’Ungava, à l’est, sont pour l’instant épargnés par ces ruptures de services et la totalité des services de santé y est maintenue.

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CATHERINE HOURS AGENCE FRANCE-PRESSE Le recrutemen­t du personnel de santé dans le Grand Nord est compliqué par les conditions de travail difficiles et l’importante pénurie de logements.

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