Recul de Québec sur la réouverture complète des bibliothèques
Après avoir annoncé dans la journée de dimanche que les bibliothèques du Québec pourraient avoir « tous les espaces ouverts pour tous, tout en respectant les mesures sanitaires obligatoires », le ministère de la Santé est revenu lundi matin sur sa décision, à la suite d’une intervention de la Santé publique. « Bien que le décret indique une pleine ouverture des bibliothèques, il faudrait parler d’un accès limité aux comptoirs et pour la clientèle étudiante », a précisé Robert Maranda, des relations avec les médias.
En début d’après-midi, les éclaircissements demandés sur l’application de ces nouvelles consignes de la Santé publique n’étaient toujours pas apportés. Au contraire, Marjorie Larouche, aussi du ministère de la Santé, précisait au Devoir qu’à cette étape, l’heure était plutôt revenue à la discussion. « Les modalités relatives à l’application de cette mesure sont présentement en discussion et feront l’objet de précisions ultérieurement », a-t-elle indiqué au Devoir.
L’Association des bibliothèques publiques du Québec (ABPQ) a reçu de son côté une requête plus claire, mais venant du ministère de la Culture. « En gros, on nous demande de respecter l’intention exprimée par le premier ministre [François Legault] lors de la conférence de presse du 6 janvier : l’ouverture des espaces de travail aux étudiants et aux élèves seulement », a expliqué la directrice générale, Eve Lagacé, en début d’après-midi. Le prêt sans contact de documents se poursuitil ? « Oui », a-t-elle répondu.
Le ministère a-t-il justifié ce recul ? « Je n’ai pas eu d’explications, et il n’y a pas de décret publié encore. Mais comme on nous formule la même demande à la fois du côté de la Culture et du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation, c’est cette recommandation qu’on vient d’envoyer à nos membres. » Comment l’ABPQ réagitelle ? « On préférerait avoir accès à une information complète et claire rapidement pour que nos membres puissent s’organiser afin de répondre aux besoins de la population le plus vite possible. »
Chez les bibliothécaires, une fatigue et des émotions à fleur de peau se révélaient déjà à l’annonce de la réouverture lundi matin, selon ce qu’a pu observer Le Devoir. Plusieurs estimaient illogique de rouvrir au pic de la pandémie, et voyaient là une contradiction avec le confinement et le couvre-feu. D’autres, moins nombreux, se réjouissaient d’être considérés comme un service essentiel.
Line Lamarre, présidente du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, qui représente les employés de Bibliothèques et Archives nationales du Québec, a été informée par Le Devoir du rétropédalage sur l’ouverture des bibliothèques. « Ah ! Seigneur ! Je suis sidérée, a-t-elle dit spontanément. On trouvait que c’était une bonne idée de rouvrir les bibliothèques. On peut y contrôler tellement facilement la circulation. C’est très décevant. »
Mme Lamarre ne comprend pas pourquoi, si on ouvre les écoles, on garde les bibliothèques, mais aussi les musées fermés. « C’est très important pour la santé mentale des gens. J’ai de la misère avec la géométrie variable des communications selon les ministères, poursuit la présidente. Jusqu’à maintenant, le ministère de la Santé nous informe avant d’annoncer ses décisions et tente de nous tenir au courant de façon très serrée, mais coudonc ! J’apprends des choses par le journal que je devrais apprendre par le ministère de la Culture. »
En fin de soirée, au moment où ces lignes étaient écrites, les attentes gouvernementales sur l’application des consignes en bibliothèques n’avaient toujours pas été précisées au Devoir, ni par le ministère de la Santé ni par celui de la Culture.