Le Devoir

Après 30 ans, la justice clôt l’enquête sur l’assassinat d’Olof Palme

- HÉLÈNE DAUSCHY À STOCKHOLM AGENCE FRANCE-PRESSE

La Suède tourne l’une des pages les plus sombres de son histoire moderne : plus de trente ans après l’assassinat du premier ministre Olof Palme, la justice a désigné mercredi le principal suspect dans cette affaire, aujourd’hui décédé, mettant un terme à son enquête.

Stig Engström, un opposant aux idées de gauche d’Olof Palme et identifié comme le principal suspect de cette enquête hors norme, est mort en 2000.

« Puisque la personne est décédée, je ne peux pas engager des poursuites ni l’interroger. C’est pourquoi j’ai décidé de clore cette enquête », a déclaré le procureur responsabl­e de l’affaire Krister Petersson, lors d’une conférence de presse en visioconfé­rence.

Dirigeant social-démocrate charismati­que, Olof Palme a été abattu sur un trottoir gelé du centre de Stockholm le 28 février 1986, à l’âge de 59 ans, alors qu’il rentrait à pied du cinéma avec sa femme, sans gardes du corps.

Son meurtrier avait réussi à prendre la fuite, emportant avec lui l’arme du crime, qui n’a jamais été retrouvée.

Interrogé par la radio suédoise, l’un des fils d’Olof Palme, Mårten, a estimé mercredi qu’« Engström [était] coupable ».

L’actuel premier ministre suédois, Stefan Löfven, a lui dit espérer que « la plaie [ouverte par le meurtre] puisse désormais cicatriser ». « Que le premier ministre d’un pays soit assassiné est un traumatism­e national », a-t-il affirmé à la presse.

Le nom de Stig Engström, également connu comme « l’homme de Skandia », du nom de l’entreprise pour laquelle il travaillai­t à l’époque, est régulièrem­ent apparu dans la presse en tant que suspect.

Arrivé parmi les premiers sur les lieux du crime, selon ses dires, il s’était présenté comme témoin aussi bien auprès de la police que des médias, mais les autorités jugeaient ses déclaratio­ns peu fiables, car éminemment changeante­s. Il avait 52 ans au moment des faits.

Mercredi, le parquet est revenu sur les témoignage­s accréditan­t l’idée que Stig Engström ait pu commettre le crime. Stig Engström, décrit par le procureur comme un homme « fragile », gravitait dans les « cercles critiques de la politique de Palme » et avait également accès à des armes.

Il aurait vraisembla­blement agi seul selon le parquet, qui n’exclut pas « complèteme­nt » l’hypothèse d’un complot. Homonyme du magistrat responsabl­e du dossier, un autre homme, Christer Pettersson, identifié par la femme d’Olof Palme, avait été déclaré coupable de l’assassinat en juillet 1989 avant d’être relaxé en appel quelques mois plus tard, pour insuffisan­ce de preuves.

Son témoignage avait aussi été fragilisé par les conditions, entachées d’irrégulari­tés, dans lesquelles il avait été recueilli. Il est mort en 2004.

Au fil des années, ont été également soupçonnés, entre autres, le Parti des travailleu­rs du Kurdistan (PKK, séparatist­es kurdes turcs), l’armée et la police suédoises ou les services secrets sud-africains — Olof Palme était très critique à l’égard de la politique d’apartheid du pays.

Durant l’enquête, la police avait été vivement critiquée pour son manque de sérieux et les pistes hasardeuse­s qu’elle avait empruntées.

Le soir du drame, elle n’avait pas correcteme­nt bouclé la scène du crime, détruisant ainsi de potentiell­es preuves, une bévue qui hante encore les enquêteurs aujourd’hui.

Le meurtrier de l’ancien premier ministre avait réussi à prendre la fuite, emportant avec lui l’arme du crime, qui n’a jamais été retrouvée

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