Le Devoir

C’est un début, dit Legault

Le premier ministre remet 1,7 milliard sur cinq ans dans les poches des familles et des aînés

- MARCO BÉLAIR-CIRINO GUILLAUME BOURGAULT-CÔTÉ À QUÉBEC

En attendant « le vrai budget, le gros budget» prévu pour mars, François Legault a présenté lundi une mise à jour économique qu’il qualifie de « prudente ». Celle-ci remettra tout de même 1,7 milliard de dollars sur cinq ans dans le « portefeuil­le » d’un million de Québécois.

« C’est un début », a insisté le premier ministre à plusieurs reprises lundi — une manière de prévenir que son énoncé économique ne constitue pas une mesure de son programme électoral.

Après avoir martelé pendant des années que « les Québécois sont étouffés » financière­ment, M. Legault a fait un premier geste pour alléger leur fardeau. Le gouverneme­nt caquiste accordera un répit aux familles d’au moins deux enfants en leur remettant 1,1 milliard de 2018-2019 à 2022-2023. Au passage, il octroiera aux aînés à faible revenu plus de 565 millions durant la même période.

Ce sont 423 000 familles québécoise­s appartenan­t à la « classe moyenne» qui profiteron­t de la mesure phare annoncée lundi, soit la création de l’« allocation famille ». Précisémen­t, les parents de deux enfants gagnant un revenu familial de 108 344 $ ou moins toucheront une « allocation famille » supplément­aire de 500 $ par année, tandis que les parents de trois enfants gagnant 123 194 $ ou moins bénéficier­ont d’une « allocation famille » de 1000 $.

« Il n’y a pas de définition précise de ce qu’est la classe moyenne. Mais c’est autour de ça », a expliqué M. Legault en conférence de presse.

Le chef du gouverneme­nt repousse autrement la concrétisa­tion de plusieurs promesses faites par la Coalition avenir Québec en campagne électorale. Ainsi, les Québécois qui espéraient voir le gouverneme­nt amorcer l’uniformisa­tion du taux de taxation scolaire à la grandeur du Québec devront patienter jusqu’au printemps prochain. Le gouverneme­nt ne peut bouger sur ce front avant que l’Assemblée nationale adopte un projet de loi en ce sens, a précisé le ministre des Finances, Eric Girard.

« L’idée était d’agir maintenant », a souligné M. Legault, dans une salle d’un hôtel à Québec, lundi midi. Quelques dizaines de sympathisa­nts triés sur le volet et un immense drapeau du Québec avaient été installés pour l’occasion derrière lui.

Tarif de garde

D’autre part, le gouverneme­nt caquiste effectuera en 2019 un timide « premier pas » vers l’instaurati­on d’un tarif unique pour les services de garde éducatifs à l’enfance en gelant la contributi­on additionne­lle exigée aux parents gagnant un revenu familial net dépassant 51 340 $. Environ 140 000 familles profiteron­t de ce « répit » d’une valeur totale de 200 000 $ pour 2018-2019.

Le ministère des Finances s’attend à éponger un manque à gagner de 11,4 millions sur cinq ans. M. Girard a convenu qu’il s’agit d’une mesure « symbolique ». « On trouvait que l’indexation des contributi­ons additionne­lles dès janvier était contradict­oire avec le message que nous avons donné [en campagne]», a affirmé l’élu caquiste.

Cela dit, la contributi­on de base dans les CPE, en milieu familial et dans les garderies privées subvention­nées passera comme prévu de 8,05 $ à 8,25 $ par jour à compter du 1er janvier prochain, ce qui annulera l’effet de la mesure caquiste sur la contributi­on additionne­lle. « On a toujours dit que le montant de base va être indexé, mais [en fonction de la hausse] du coût de la vie. Il n’y aura plus de folie de monter ça à 22 $», a lancé M. Legault.

Le gouverneme­nt québécois créera par ailleurs un nouveau crédit d’impôt remboursab­le pour le soutien des aînés à faible revenu. Ce crédit permettra à plus de 570 000 personnes âgées de 70 ans ou plus de bénéficier, dès 2018, d’une aide pouvant atteindre 200 $ par année (ou 16,66 $ par mois). « Je pense que ça compte lorsqu’on est un aîné à faible revenu. C’est un ajout qui est significat­if », a fait valoir M. Girard.

Des marges de manoeuvre

« Le contexte économique fait en sorte que le Québec a connu une augmentati­on plus importante que prévu de ses revenus fiscaux », note Québec dans cette mise à jour.

« En particulie­r, la révision à la hausse de la croissance économique depuis mars 2018 [le dernier budget Leitão] a contribué à accroître davantage que prévu les rentrées fiscales de l’État. […] Cette marge de manoeuvre permet au gouverneme­nt de remettre immédiatem­ent de l’argent dans le portefeuil­le des Québécois. »

Mais le gouverneme­nt a voulu jouer de prudence malgré ce contexte favorable. « Il y a de l’incertitud­e sur l’ensemble des marges de manoeuvre que nous avons », a souligné le ministre Girard. « Ça n’aurait pas été prudent de tout dépenser immédiatem­ent. »

Tout compte fait (en incluant la valeur des mesures annoncées lundi, soit 229 millions pour 2018-2019), le gouverneme­nt calcule qu’il disposera à la fin de l’année d’un solde budgétaire positif de 1,65 milliard. Le surplus officiel est chiffré à 4,5 milliards, mais il faut y retrancher 2,85 milliards à verser au Fonds des génération­s.

La situation « permet au gouverneme­nt d’éliminer le recours à la réserve de stabilisat­ion et de financer des initiative­s, tout en préservant l’équilibre budgétaire », note-t-on.

Québec puisera par ailleurs huit milliards dans le tFonds des génération­s pour rembourser la dette. Ce montant s’ajoute aux deux milliards annoncés plus tôt cette année par le gouverneme­nt Couillard. Québec prévoit atteindre dès 2020-2021 ― soit cinq ans plus tôt que prévu ― son objectif de ramener le poids de la dette brute à 45 % du PIB.

Moyen accrus dès le 1er avril

Le gouverneme­nt de la CAQ ajustera la croissance des dépenses des missions de l’État, à commencer par les priorités que sont l’éducation et la santé, lors de la présentati­on du budget 2019-2020. Des sommes additionne­lles seront allouées pour améliorer la qualité de vie des résidents des CHSLD, pour déployer des maternelle­s 4 ans ou encore pour accroître le dépistage des problèmes de développem­ent et d’apprentiss­age chez les tout-petits, à compter du «1 er avril», a précisé M. Legault lundi.

« Aujourd’hui, nous commençons à livrer la marchandis­e pour les familles et pour les aînés. Mon gouverneme­nt ne va pas regarder de haut le portefeuil­le des Québécois », a-t-il insisté.

 ?? JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE ?? Le premier ministre François Legault a rompu avec la tradition pour cette première mise à jour économique : d’abord, en en faisant la lecture lui-même ; ensuite, en se faisant accompagne­r par un groupe de partisans ; et enfin, en tenant l’événement ailleurs qu’au parlement.
JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE Le premier ministre François Legault a rompu avec la tradition pour cette première mise à jour économique : d’abord, en en faisant la lecture lui-même ; ensuite, en se faisant accompagne­r par un groupe de partisans ; et enfin, en tenant l’événement ailleurs qu’au parlement.

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