Pour être député, il faut savoir se taire
Je suis loin d’être un fan de Maxime Bernier et de son parti, mais force est de constater encore une fois que notre système parlementaire désuet et rétrograde ainsi que notre mode de scrutin forcent nos députés à répéter la cassette du parti ou à se taire.
Maxime Bernier doit, à cause de ce système, se taire ou partir parce que certaines de ses positions ne sont pas en droite ligne avec celles de son parti et que, sur certains sujets, il est plus conservateur ou plus à droite que son chef.
Ce vieux système, où le chef de gouvernement est le chef de parti qui obtient la confiance de la Chambre, donc d’une majorité de députés, condamne ceux-ci au silence lorsqu’ils divergent d’une politique de leur parti. Ce système les empêche également de représenter correctement les électeurs de leur circonscription si un projet du gouvernement ou de leur parti va à l’encontre des intérêts de la majorité de ceux-ci.
Seul un système où l’exécutif n’émane pas du législatif et où le chef du gouvernement est élu au suffrage universel permet aux députés plus de liberté d’expression et de représentation.
Notre mode de scrutin uninominal à un tour crée très souvent, dès qu’il y a plus de deux partis, des gouvernements très peu légitimes, élus avec environ 30 % des voix exprimées. Il n’est donc pas surprenant que bien des nouveaux gouvernements se retrouvent avec plus de 60 % d’insatisfaction après seulement quelques mois.
Certains diront que c’est peine perdue que de tenter d’instaurer ici un système présidentiel qui demanderait un chambardement constitutionnel pour se détacher de la monarchie. Je pense au contraire que l’on peut y arriver en modifiant seulement le mode de scrutin pour permettre l’élection du chef du gouvernement au suffrage universel pour un mandat fixe en même temps que les élections législatives. On devrait également instaurer le vote majoritaire à deux tours, comme en France, où l’élu jouit d’une légitimité appuyée sur une majorité d’au moins 50 %+1 des voix exprimées.
Finalement, ce changement au mode de scrutin éliminerait également l’instabilité anticipée si on décidait d’ajouter une composante de proportionnelle pour assurer une meilleure représentation des partis et des différents courants d’opinion.
D’ici là, les députés seront condamnés à être des porte-voix du bureau du chef et des ventriloques des lignes du jour sans aucune marge de manoeuvre pour représenter les courants divergents chez leurs électeurs respectifs.
Malheureusement, chaque fois que l’on tente de réformer, s’enclenchent des calculs partisans pour chercher le système qui avantagerait le parti au pouvoir selon les résultats de la dernière élection. Comme ces changements doivent recevoir l’aval de l’ensemble des partis pour être recevables, les propositions calculées émanant des gouvernements sont rejetées par les partis d’opposition et la réforme reportée aux calendes grecques. Tout système différent amènerait une dynamique différente et des résultats modifiés ; ces calculs partisans qui bloquent tout changement sont complètement inutiles.
La qualité de notre vie démocratique y gagnerait beaucoup si on remplaçait finalement notre vieux système taré pour permettre une meilleure représentativité de l’ensemble des courants de notre société.