La Commission européenne veut interdire certaines pratiques déloyales
L’objectif serait de mieux protéger les petits et moyens agriculteurs
Bruxelles — La Commission européenne veut bannir certaines pratiques commerciales jugées déloyales au sein de la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire, qui désavantage trop souvent les petites et moyennes entreprises et les agriculteurs, a affirmé mercredi à l’AFP le commissaire à l’agriculture, Phil Hogan.
L’exécutif européen doit dévoiler jeudi une proposition de directive visant à rendre «plus justes» les relations entre les agriculteurs, premier maillon de la chaîne, et les acheteurs, industriels ou distributeurs.
« Cela fait 20 ans, et plus particulièrement depuis 5 ou 6 ans, que l’on parle de la réduction des marges de profits des agriculteurs dans les transactions avec d’autres acteurs de la chaîne alimentaire », souligne Phil Hogan.
La réponse de la Commission, qui fait suite à une demande pressante à la fois du Parlement européen et des États membres, vise à interdire certaines «pratiques commerciales déloyales», comme les retards de paiement ou les annulations de dernière minute de commandes. Ou encore, en l’absence d’accord entre l’acheteur et le vendeur, la fin des paiements destinés in fine à promouvoir des produits dans un rayon de supermarché.
«La grande majorité des législateurs ou acteurs de la chaîne alimentaire soutiennent la perspective d’avoir une meilleure coordination» entre États membres, assure M. Hogan, qui s’est inspiré de législations existantes dans de nombreux pays de l’UE.
La France, par exemple, a présenté fin janvier un projet de loi censé mettre fin à la guerre des prix entre distributeurs et donner un peu d’air aux agriculteurs. Parmi les mesures phares, le relèvement du seuil de revente à perte ou la fin de l’offre dite «un produit acheté, un produit offert».
L’instance d’arbitrage britannique en la matière, le Groceries code adjudicator, l’organisme de réglementation indépendant qui veille à ce que les principaux supermarchés traitent leurs fournisseurs directs de façon légale et équitable, a également servi de modèle.
La proposition législative de jeudi est la deuxième étape du plan de la Commission pour assurer plus de pouvoir de négociation aux agriculteurs dans la chaîne alimentaire, après avoir révisé la réglementation sur les organisations de producteurs et avant de se pencher sur la transparence des prix d’ici la fin de l’année.
EuroCommerce, association européenne des distributeurs européens qui compte parmi ses membres Auchan, Carrefour, Lidl, Coop, Spar ou Kingfisher, a d’ores et déjà fait part de sa désapprobation.
« La Commission n’a produit aucune preuve d’un problème structurel ou de l’utilité d’une législation européenne pour le résoudre», affirme dans un communiqué Christian Verschueren, directeur général d’EuroCommerce.
Selon les distributeurs, la nouvelle législation « imposera une régulation inutile dans les pays où le dialogue et une meilleure organisation des agriculteurs ont mené à un bon fonctionnement de la chaîne d’approvisionnement alimentaire sans législation spécifique ».
« Toute chaîne de supermarchés, tout industriel ou tout autre acteur de la chaîne qui traite les producteurs équitablement n’a aucun souci à se faire », répond Phil Hogan.