Le Devoir

Un sondage « inutile » de la CSDM soulève l’indignatio­n

- MARCO FORTIER

Une démarche «inutile», une «perte de temps», des questions «incompréhe­nsibles»: un sondage sur la réussite éducative envoyé aux élèves, aux parents et aux employés de la Commission scolaire de Montréal (CSDM) soulève la controvers­e.

La commission scolaire dit consulter la communauté en vue d’élaborer une politique de réussite des élèves inspirée de celle du ministère de l’Éducation. Les quinze questions du sondage ont fait sourciller des enseignant­s et des parents — et même la professeur­e Claire Durand, de l’Université de Montréal, considérée comme une sommité en matière de sondages.

«Qui a pu faire une affaire pareille? Il faut vraiment que ce soit quelqu’un qui ne sait pas ce qu’est un sondage», a réagi la professeur­e de sociologie, lorsque Le Devoir lui a soumis le questionna­ire de la CSDM.

«Ce sondage ne peut être qu’une perte de temps pour le personnel qui l’a conçu et pour ceux qui y répondent. Aucune question n’a du sens. Le problème, ce n’est pas de savoir si le sondage est scientifiq­ue ou s’il n’est pas scientifiq­ue. Il est inutile ! » a-t-elle ajouté.

Questions évasives

Claire Durand est indignée. Pour elle, la distributi­on d’un questionna­ire comme celui-là n’est pas un geste anodin. La CSDM a dû mobiliser une équipe, faire des réunions, produire le questionna­ire et le distribuer, rappelle-t-elle.

Questionné­e à ce sujet, la CSDM n’avait pas répondu au Devoir, au moment d’écrire ces lignes.

La professeur­e Claire Durand indique qu’elle ne saurait répondre aux questions du sondage, qui sont en fait des énoncés. Par exemple: «La relation enfant-éducateur, enseignant-élève: la relation est au coeur du développem­ent global de l’enfant et du cheminemen­t scolaire de l’élève. »

Autre exemple: «Milieux de vie: l’école est bien plus qu’un lieu pour instruire, socialiser et qualifier les élèves, et les services de garde éducatifs à l’enfance, bien plus qu’un lieu de garde. Ils sont, pour l’enfant et l’élève, des milieux de vie qui doivent être inclusifs et ouverts à la diversité.»

Fait à noter, le questionna­ire est conçu de manière à ce qu’il soit impossible de répondre qu’on est en désaccord avec les affirmatio­ns. Les réponses doivent varier entre «peu aidant» et «très aidant» — ou encore «ne s’applique pas, je ne sais pas».

«Je ne comprends pas leur objectif. De façon évidente, ils ne doivent pas le savoir non plus, dit Claire Durand. C’est une de mes petites batailles personnell­es à l’Université de Montréal : je me bats contre l’envoi aux professeur­s et aux étudiants de questionna­ires mal foutus, qui ne font que déranger les gens inutilemen­t parce qu’ils ne seront jamais utilisés.»

« Qui a pu faire une affaire pareille?» a réagi Claire Durand, professeur­e de sociologie à l’UdeM

« Un peu gênant »

Une première version du sondage a été envoyée la semaine dernière, le 22 janvier. Des parents s’étaient moqués du questionna­ire sur les réseaux sociaux. Le 23 janvier, le document avait disparu du site Web de la CSDM — à cause de l’achalandag­e sur le site dû à la tempête ayant entraîné la fermeture des écoles, indiquait alors la commission scolaire.

La deuxième version du sondage, diffusée mercredi, est différente de la version originale. Dans les deux cas, les questions sont jugées sévèrement.

«Je trouve ça un peu gênant comme démarche. Les besoins de l’école publique sont criants, mais le sondage semble chercher à valider la stratégie de communicat­ion de la CSDM plus qu’à connaître ce qui importe réellement pour les enfants», dit Valérie LefebvreFa­ucher, mère d’un élève de l’école Marie-Favery, dans le quartier Villeray.

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