Le Devoir

QS mise sur la méthode Sanders

Le parti a conçu une plateforme pour tenter de décentrali­ser l’action militante

- GUILLAUME BOURGAULT-CÔTÉ

Appelons cela l’inspiratio­n Bernie Sanders: en prévision des élections 2018, Québec solidaire (QS) souhaite décentrali­ser l’action militante de ses sympathisa­nts pour en démultipli­er l’effet. Au risque de «perdre un peu le contrôle sur le message ».

«On veut éliminer tous les obstacles entre l’envie de s’impliquer et le fait de s’impliquer », indiquait jeudi le député Gabriel Nadeau-Dubois à une quinzaine de jeunes organisate­urs bénévoles. Ceux-ci étaient réunis dans un local industriel de Montréal pour tester une nouvelle plateforme nommée «Mouvement», développée par QS au coût de 25 000 $.

Accessible sans contrainte en ligne, Mouvement centralise pour mieux… décentrali­ser. La plateforme se présente ainsi comme une sorte de carrefour interactif de tout ce qui se fait et s’organise autour de Québec solidaire: activités officielle­s et non officielle­s, calendrier et carte des événements à venir, boîte à outils pour «contribuer au mouvement» — incluant des logos du parti qui peuvent être imprimés sur des dépliants maison.

Entre autres choses, un militant qui aurait une demiheure à donner au parti un soir pourrait le signaler sur la plateforme et recevoir une liste de numéros de téléphone à contacter. Il ferait les appels de chez lui, sans organisate­ur au-dessus de son épaule.

Tout pour faciliter l’implicatio­n, souhaite-t-on. «Le pari fondamenta­l, c’est celui de la décentrali­sation, et oui, d’une forme de perte de contrôle, soutient M. Nadeau-Dubois. C’est de prendre à contre-pied la culture de base des partis, qui est toujours verticale: on veut contrôler, on veut faire attention, on ne veut pas avoir l’air fou. C’est la logique naturelle. Nous, on veut lâcher du lest. Mais ça implique que quelqu’un peut bafouiller au téléphone… »

Mouvement plus que parti

Le co-porte-parole du parti inscrit cette initiative dans la foulée de ce qu’il promettait à son arrivée en politique l’an dernier: rapprocher le parti d’un mouvement social.

Dans le cas présent, la principale nouveauté consiste en la possibilit­é, pour les militants, d’organiser des activités identifiée­s à QS sans que personne du parti autorise l’événement.

«C’est l’idée derrière la campagne de Bernie Sanders [candidat à l’investitur­e des démocrates américains], reconnaît Gabriel Nadeau-Dubois: donner beaucoup d’autonomie aux militants, leur faire confiance. »

Les activités officielle­s seront identifiée­s comme telles. Mais pour le reste, n’importe qui peut essentiell­ement proposer n’importe quoi. Québec solidaire ne craint pas les dérapages. «Dans le cas de Sanders, il y a peut-être eu deux, trois événements qui ont mal été sur des milliers», dit M. Nadeau-Dubois.

Et ailleurs?

Interrogés jeudi, des organisate­urs libéral, péquiste et caquiste notaient tous qu’il est déjà possible pour des militants de leur parti de proposer des activités.

«Mais c’est vrai que pour utiliser le nom du Parti québécois, il y a un processus d’approbatio­n qui suit», dit l’attaché de presse du parti, Yannick Grégoire. Les échos sont semblables à la Coalition avenir Québec et au Parti libéral du Québec.

En ce qui concerne la décentrali­sation des initiative­s, ces partis qui ont des élus un peu partout en réfèrent aux associatio­ns de circonscri­ptions.

«Nous en avons 125 à travers le Québec et chacune d’elles s’occupe de l’animation régionale, d’organiser des assemblées de cuisine ou d’autres événements», indique le directeur des communicat­ions des libéraux, Maxime Roy.

Et au-delà de ça, la bataille électorale va aussi se jouer autour des logiciels que chacun possède pour solidifier et élargir son vote. Banque de données précises, gestion de listes, messages microciblé­s: peu de choses sont en apparence laissées au hasard… et c’est un peu là que Québec solidaire veut faire cavalier seul.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Gabriel Nadeau-Dubois s’est entretenu avec une quinzaine de bénévoles de QS réunis jeudi à Montréal pour tester une nouvelle plateforme nommée «Mouvement».

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