Moubarak libéré, les espoirs de la révolution s’envolent
L' ex-président égyptien Hosni Moubarak a retrouvé la liberté vendredi, mais plusieurs figures du Printemps arabe dorment encore derrière les barreaux: dans l’Égypte de Sissi, la révolution de 2011 vient d’être liquidée symboliquement.
C’est son avocat Farid alDeeb qui a annoncé vendredi le départ de M. Moubarak de l’hôpital militaire du Caire, dans lequel il a passé l’essentiel de ses six années de détention.
La libération de M. Moubarak, qui avait régné sans partage sur le pays pendant 30 ans, vient briser définitivement les aspirations nées d’une révolution qui avait porté l’espoir d’un régime plus démocratique.
Outre M. Moubarak, son exministre de l’Intérieur, Habib alAdly, qui symbolise la torture et les abus du régime, a aussi été acquitté pour les meurtres de manifestants pendant la révolte.
En revanche, Alaa Abdel Fattah et Ahmed Douma, deux des plus importants meneurs de la révolution, sont toujours en prison.
Depuis que l’actuel président, Abdel Fattah al-Sissi, exchef de l’armée, a destitué son prédécesseur islamiste Mohamed Morsi en 2013, il dirige à son tour le pays d’une main de fer, éliminant toute forme d’opposition.
M. Moubarak a été jugé dans deux grandes affaires depuis son départ du pouvoir.
Il a notamment été accusé d’avoir incité au meurtre de manifestants pendant la révolte, au cours de laquelle quelque 850 personnes ont été tuées lors d’affrontements avec la police.
Condamné à la prison à vie en 2012, il a été blanchi en 2014. Et le 2 mars dernier, la Cour de cassation a confirmé cet acquittement.
Traitement spécial
Pour Adel Ramadan, avocat pour l’organisation de défense des droits de la personne Egyptian Initiative for Personal Rights, M. Moubarak a bénéficié d’un traitement spécial lors de son procès.
Si des militants ont été remis en liberté, certains sont astreints à un contrôle judiciaire strict. Ahmed Maher, fondateur et porte-parole du Mouvement du 6 avril, un groupe très actif en 2011, a été libéré en janvier. Pendant trois ans, il devra se rendre chaque soir au commissariat de son quartier et y passer la nuit.
Et la semaine dernière, les autorités ont gracié 203 détenus dans des procédures liées à l’interdiction de manifester. Mais aucun militant réputé n’est sorti de prison.
Après la destitution de M. Morsi, l’opposition islamiste a aussi été laminée. En août 2013, l’assaut est donné au Caire contre des milliers de pro-Morsi. Environ 700 d’entre eux sont tués. «Les conditions qui ont mené à la révolution de janvier sont toujours présentes, bien que j’exclue qu’une autre révolution puisse avoir lieu», explique Mostafa Kamel el-Sayed, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire.