La Terre de chez nous

Les cochons au pâturage, victimes de leur succès?

- MARTIN MÉNARD mmenard@ laterre.ca

Les cochons au pâturage ont la cote. Les producteur­s aiment cet élevage et les consommate­urs en apprécient le produit, mais tout n’est pas rose dans le monde de ce cochon élevé au grand air.

« On a réussi à obtenir une viande de porc persillée, plus haut de gamme. Les ventes allaient vraiment bien. On se faisait courir après par les clients. On était rendu à un élevage de 60, mais on a backé. On a descendu pas mal », explique Donald Mathieu, de la Ferme Le groin dans le foin, en Gaspésie. Ce dernier explique que l’abattage des bêtes devenait un frein, une étape qui avait lieu à Lévis, à six heures de route. Les permis de transforma­tion pesaient lourd aussi. « Il fallait un permis pour ci, un permis pour ça. On se croyait dans Les 12 travaux d’Astérix », dit M. Mathieu qui travaille à temps plein comme enseignant en mathématiq­ue. Le temps était venu de choisir entre l’enseigneme­nt ou les porcs. Et l’élevage de cochons, pour en vivre, nécessitai­t un investisse­ment important. Les mathématiq­ues l’ont emporté. Donald Mathieu et sa conjointe demeurent toutefois positifs. « Il y a vraiment un marché pour de la viande de porc plus haut de gamme. L’élevage, c’est demandant, mais c’est très agréable », dit celui qui élève encore quelques bêtes.

Au nord de Joliette, Ludovic Beauregard produit des porcs au pâturage depuis plus de 10 ans. « J’ai de la demande en masse. J’ouvre les ventes le 1er février et 5 jours plus tard, tout est vendu. Je produis 70 cochons par année et si je pouvais en faire plus, je vendrais tout. Mais l’un des gros défis, c’est l’abattage. Chaque année, je me dis que je vais arrêter mon élevage de porcs à cause de ça. Les abattoirs ne sont pas intéressés à faire du cochon de couleur. C’est plus de troubles pour eux autres. C’est le gros maillon faible », explique l’éleveur et maraîcher qui affirme avoir plusieurs bons exemples d’abattoirs, en Suisse ou aux États-Unis, qui sont mieux adaptés aux petits élevages de porcs comme le sien.

Double engouement

Ludovic Beauregard, de la Ferme des Arpents roses est souvent cité comme référence, lui qui offre l’une des rares formations sur l’élevage de porcs au pâturage. À ce sujet, il dit que l’engouement est très fort pour des gens qui désirent se lancer dans ce type d’élevage. « J’ai l’impression que ça continue à augmenter. Il y a beaucoup d’intérêt; des gens qui veulent élever quelques cochons pour eux, d’autres qui veulent partir un petit élevage pour en vendre. Mais il ne faut pas s’imaginer que tu mets les cochons au pâturage et que ça finit là. C’est exigeant, comme n’importe quelle production. Il faut surveiller les maladies, l’alimentati­on, etc. », détaille-t-il, en spécifiant que contrairem­ent à ce que les gens pensent, le pâturage ne compte pas pour une grande portion de l’alimentati­on du porc, lequel n’est pas un ruminant.

Même son de cloche chez l’un des plus gros producteur­s de porcs au pâturage, la Ferme d’ORée, en Estrie, qui en élève près de 1 000 par année.

« Je vois qu’il y a plus de gens qui élèvent du porc au pâturage. J’ai des boucheries qui m’en prennent moins parce qu’ils encouragen­t maintenant d’autres éleveurs. Et c’est correct, car il y a aussi de nouveaux joueurs qui arrivent, comme des petites charcuteri­es, qu’on ne voyait pas avant et qui nous prennent un ou deux cochons par semaine », expose Gert Janssens, copropriét­aire de la ferme.

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Gert Janssens dit qu’une race de porc différente comme les Berkshire et les efforts de sélection génétique conduisent à une viande de porc au goût unique. Malgré la popularité de la viande de porc au pâturage, les éleveurs doivent s’efforcer d’en donner pleinement pour l’argent des consommate­urs et non seulement profiter de l’occasion d’affaires qui s’offre à eux, nuance-t-il.
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Malgré le succès de sa viande de porcs élevés au pâturage, la Ferme Le groin dans le foin a dû diminuer significat­ivement sa production.

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