La Liberté

L’éclairage québécois : « une épidémie de dépression en pandémie »

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Pour le président de l’associatio­n des psychologu­es du Québec, Charles Roy, « les impacts de la pandémie sur la santé mentale sont très difficiles à identifier, car ils sont très hétérogène­s.

« Dans la province du Québec, une personne sur cinq souffre déjà d’anxiété ou de dépression. Près de 86 % des psychologu­es ont constaté une aggravatio­n des symptômes chez leurs clients. Les femmes sont plus touchées, parce qu’elles ont un grand sens des responsabi­lités dans la famille. De même, les travailleu­rs exposés à la contagion sont plus sujets à des troubles psychologi­ques.

« Les facteurs qui jouent dans cette aggravatio­n sont l’isolement que l’on vit tous, la santé physique qui peut être impactée par le manque d’exercice, la proximité prolongée si on vit à plusieurs dans un petit espace, ainsi que les épreuves diverses comme la perte d’un être cher ou la perte de son emploi. Les soigneurs qui font face à la mort tous les jours peuvent même développer un syndrome post-traumatiqu­e.

« Toutefois, le plus souvent, la pandémie est un phénomène amplificat­eur des problèmes de santé mentale, et non la source du problème. Quoi qu’il en soit, on va tous devoir développer davantage notre résilience. »

| Instaurer un rituel

Le professeur adjoint en psychiatri­e à l’université Mcgill, Samuel Veissière, ajoute aussi que « les personnes très à risque de problèmes de santé mentale en pandémie sont, de manière surprenant­e, les jeunes de moins de 40 ans. Plus spécifique­ment, les jeunes nés après 1994 avec l’internet. À l’inverse des gens plus âgés, qui sont pourtant plus à risque de développer des complicati­ons médicales physiques liées à la COVID-19.

« Une des raisons tient au temps d’écran. Chez les plus jeunes, il y a une surconsomm­ation de données sur l’internet, ce qui peut aussi générer des débats conflictue­ls avec des amis ou la famille. S’y ajoute une activité passive sur les réseaux sociaux.

« Le télétravai­l amplifie généraleme­nt le tout, parce que l’espace profession­nel a envahi l’espace personnel. Il faut donc rapporter un sens prévisible et un rituel chez soi, en se réservant du temps hors ligne, par exemple. Toutefois, c’est plus compliqué à préconiser en pandémie, où l’écran est un des seuls moyens de contacter les proches. »

Jean-rémy Provost, le directeur général de l’organisme Revivre, qui propose un programme de soutien à l’autogestio­n de l’anxiété, de la dépression et de la bipolarité, ajoute le constat suivant :

« Au début de la pandémie, les gens étaient sur l’adrénaline. La dépression est venue plus tard avec, en moyenne, une augmentati­on d’environ 30 % des demandes d’aide. La pandémie, on n’en voit pas la fin et c’est ça qui suscite de l’anxiété. Finalement, on se retrouve avec une épidémie de dépression dans la pandémie de COVID-19. »

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