INQUIÉTUDES À MISCOU
Depuis des mois, les résidents de Miscou disent avoir besoin d’au moins une déneigeuse installée en permanence sur l’île. Le gouvernement rechigne à les contenter.
Journée difficile pour les pompiers de l’île de Miscou, le mercredi 14 mars. Comme tous les Néo-Brunswickois, ils ont été gênés par la violente tempête qui a traversé la province. Surtout, ils ont dû affronter les caprices de Dame Nature pour partir en intervention.
«On a été appelé deux fois: le matin pour un feu de poteau électrique et l’aprèsmidi pour une femme qui avait un malaise», raconte Marie-Josée Chiasson, la chef pompière de la brigade.
Dans les deux cas, elle et ses hommes se sont rendus sur place et ont accompli leur devoir. Ce ne fut pas mince affaire.
Les pompiers de Miscou se sont débrouillés par eux-mêmes, avec les moyens du bord.
«On a été de l’avant. On n’est pas resté coincé heureusement. Le matin, c’est moi qui conduisais notre camion. C’était difficile et stressant.»
Marie-Josée Chiasson ne se satisfait pas de ces conditions.
«C’est une grosse perte de temps. En intervention, chaque seconde compte. Je redoute le jour où on ne pourra pas aller sur une urgence à cause des routes enneigées. Ce jour-là… Non, je ne préfère pas y penser.»
La situation ne date pas d’hier. Cela fait des mois que la chef pompière, le président du DSL, Johnny Stewart, et les résidents réclament le rétablissement d’un service de déblaiement des voies sur l’île. Ils alertent sans cesse le gouvernement.
Début décembre, Dre Denise Duguay Vibert, chef de service de l’Hôpital et centre de santé communautaire de Lamèque, a adressé une lettre aux autorités. L’Acadie Nouvelle s’en est procuré une copie.
Elle y écrit «(appuyer) les démarches entreprises pour avoir un véhicule de déneigement public sur l’île de Miscou». Ellemême est concernée; elle est domiciliée dans ce secteur de l’extrême nord-est de la Péninsule.
Des rencontres ont eu lieu avec des représentants du ministère. Aucun changement dans le dispositif actuel n’a été apporté.
«La sécurité des automobilistes est la priorité absolue du ministère des Transports et de l’Infrastructure. MTI offre des services pour enlever la neige en accord avec les services d’entretien hivernal et va continuer à offrir des services d’enlèvement de la neige dans le futur», nous indique un porte-parole de Fredericton. La fin de la saison froide ne rassure pas. «Il peut encore y avoir des tempêtes en avril et en mai. On a déjà vu ça dans le passé», souligne Philorome Bezeau.
Cet ancien employé du ministère s’est occupé du dégagement des routes et des chemins de son île natale, pendant 15 ans – avant cela, il conduisait le traversier qui reliait les îles Lamèque et Miscou. Ce retraité ne comprend pas l’inaction des élus au pouvoir.
À ses débuts, son coin de pays était pourvu de trois véhicules. Ils étaient entreposés dans un garage provincial, en bordure de la route 113, non loin de la caserne des pompiers.
«Quand j’ai arrêté, j’avais plus qu’un engin et le garage avait été reconstruit en plus petit. De trois entrées, on était passé à une.»
La bâtisse est toujours au même emplacement, mais elle est laissée à l’abandon. Que Fredericton invoque la sécurité de ses salariés avant tout irrite Philorome Bezeau.
«Il est possible de travailler en faisant attention et en prenant des précautions. C’est ce que j’ai fait tout au long de ma carrière. Et côté neige, les hivers qu’on a aujourd’hui, ce n’est rien par rapport à ceux que j’ai connus quand j’étais en poste.»
Photos personnelles à l’appui, ce septuagénaire se souvient d’avoir affronté des amoncellements de neige plus hauts que son camion et les avoir fracassés avec son brise-neige orange en forme de V. «En ne faisant rien, le ministère ne remplit pas sa mission de service public à la population», dénonce-t-il.
«Les chemins n’étaient pas dégagés. J’ai demandé au bureau du ministère des Transports et de l’Infrastructure à Bathurst qu’ils nous envoient une charrue. On n’en n’a plus à Miscou. Tout est à Lamèque maintenant. Ils m’ont répondu qu’ils ne pouvaient pas. Ils ne voulaient pas mettre en danger la vie de leurs gars.»