Regroupements municipaux: une formule à revoir
Les municipalités francophones demandent au gouvernement de «réexaminer les règles du jeu» des fusions municipales après les plébiscites manqués à Sussex et du HautMadawaska.
Au cours des trois dernières années, un peu plus de la moitié des projets de gouvernance locale ont échoué le test des urnes.
Les deux plus récents exemples remontent à lundi quand une majorité d’électeurs des villages de Lac-Baker et de Sussex Corner ont refusé respectivement de se joindre à un projet de regroupement des entités municipales du Haut-Madawaska et à la ville de Sussex.
Depuis 2013, sept projets de regroupement ou de municipalisation ont été rejetés alors que six ont reçu l’approbation d’un nombre suffisant de citoyens.
À la lumière de ces nombreux échecs, le président de l’Association francophone des municipalités du Nouveau-Brunswick (AFMNB) estime que le gouvernement provincial à la «responsabilité de réexaminer les règles du jeu pour faire en sorte que les communautés qui veulent se prendre en main puissent avoir la chance de le faire».
Selon Roger Doiron, Fredericton doit à la fois accorder un plus grand appui aux bénévoles qui pilotent ces projets de gouvernance locale et offrir de meilleurs incitatifs aux communautés qui songent à participer à ces initiatives.
«Présentement, (le gouvernement) laisse ça à des bénévoles qui doivent faire des campagnes, qui doivent faire tout le travail de base, sans avoir toutes les ressources nécessaires», constate celui qui est aussi le maire de Richibucto.
Les citoyens des DSL et des petits villages craignent souvent l’augmentation de leur fardeau fiscal en cas de fusion avec une autre municipalité.
Les accords avec le gouvernement provin- cial concernant le partage des coûts des services de police ou de l’entretien des routes «ne sont peut-être pas suffisants pour faire en sorte que l’on voit vraiment l’avantage d’une pleine municipalisation du territoire», note le président de l’AFMNB.
Le ministre de l’Environnement et des Gouvernements locaux n’était pas disponible au lendemain des plébiscites du Haut-Madawaska et de Sussex pour accorder une interview au journal.
Brian Kenny s’est contenté d’indiquer par courriel que son gouvernement a «adopté une approche volontaire lorsqu’il s’agit de restructurations communautaires».
«Cela prouve encore une fois que la population de ces communautés a le dernier mot», dit-il.
Les initiatives de Petit-Rocher (2015) et de Dundas (2014) sont parmi celles qui ont été défaites depuis trois ans, alors que la transformation du DSL de Cocagne en communauté rurale (2013) et la fusion de Tracadie-Sheila avec une vingtaine de DSL avoisinants (2013) ont reçu l’aval des citoyens.
Le leader du projet de regroupement à Tracadie, Gaétan Lanteigne, croit dur comme fer que l’absence de gouvernance locale dans plusieurs régions constitue le «frein principal de notre développement économique» au Nouveau-Brunswick.
À son avis, le processus actuel «ne fonctionne pas» et ne doit pas reposer seulement «sur les épaules de simples bénévoles», même si le mouvement doit provenir de la communauté pour que les citoyens «s’approprient» l’idée.
«Tu investis cinq ans et demi de ton temps- bénévolement dans une action dans le but de redynamiser ta communauté, puis dans l’espace d’une soirée, ça peut être un refus comme on a vu (lundi)», prévient-il.
D’après M. Lanteigne, le gouvernement pourrait enlever «des barrières fondamentales pour inciter les regroupements» ou adopter une «stratégie globale» tout en laissant les citoyens «décider de leur avenir».
Si rien ne change, des citoyens pourraient y repenser à deux fois avant de lancer leur propre projet de gouvernance locale, craint Roger Doiron.
«Est-ce que ça en vaut la peine d’entreprendre de telles démarches puisqu’à la fin on n’est pas sûr vraiment que ça va réussir? Ça peut en décourager d’autres», admet le président de l’AFMNB tout en demeurant optimiste.