Le Devoir

Éloge de la vie en couleur

Le chanteur pop Mika livre un disque tout en français, Que ta tête fleurisse toujours

- PHILIPPE PAPINEAU LE DEVOIR

Il y a des titres d’album fuyants, brumeux, et d’autres qui sont clairs et nets sur l’intention de l’artiste. Avec son plus récent disque, le populaire artiste pop Mika tombe dans la deuxième catégorie. Sa nouvelle collection de chansons s’intitule Que ta tête fleurisse toujours et porte deux informatio­ns clés : ces morceaux dansants sont en français dans le texte, en plus d’appeler l’auditeur à ne pas céder à la grisaille ou à l’immobilism­e malgré les années qui passent.

Le chanteur a passé de longs pans de sa vie aux États-Unis et a fait l’essentiel de sa carrière en anglais, sauf quelques exceptions notables, comme le tube Elle me dit. Mais le nouveau quadragéna­ire, dont le vrai nom est Michael Holbrook Penniman Jr., est né au Liban et a passé les premières années de sa vie en France. Celui qui a aussi collaboré avec Pierre Lapointe possède donc un excellent français, livré avec sa touche toute personnell­e.

« C’est le Mika French ! lance-t-il en rigolant, se moquant illico de son utilisatio­n de la formule anglaise. Ce que je dis toujours, c’est que je ne voulais pas faire semblant d’être Français. C’était plutôt cette idée d’être francophon­e, que ces différente­s identités, cette idée d’être “passager” à travers beaucoup de différente­s cultures, ce n’était pas une faiblesse, mais une force. »

Et à l’instar de Chilly Gonzales, qui a récemment aussi viré franco, Mika relève haut la main le défi de l’écriture de chansons dans la langue de Molière, optant pour une approche « candide » « sans utiliser des allégories », en plus de se servir de la rythmique des mots.

Il donne l’exemple de la pièce Sweety Banana, où il fait claquer les consonnes : « Coco sur mes lèvres / un coeur caramel / dans des bras cassés ». « C’est très fidèle à mon écriture en général, expliquet-il. Sans trop de pirouettes, mais qui raconte quelque chose de très profond, donc simple à l’extérieur, profond à l’intérieur. »

Le musicien qui a connu la gloire en début de carrière avec des titres comme Grace Kelly et Lollipop avait aussi le désir d’explorer de nouveaux territoire­s créatifs avec ce disque en français. « J’avais envie de sentir que je ne savais pas ce qui allait se passer, comment j’allais me débrouille­r. Et la nouveauté est une chose très importante, spécialeme­nt pour quelqu’un comme moi, qui viens d’avoir 40 ans. C’était bien de sentir qu’il y avait quelque chose de neuf. »

Le processus de création n’a pas été douloureux, affirme Mika, mais il a fallu près de deux ans et demi pour que celui-ci sente qu’il avait atteint son objectif, soit de livrer un album « vraiment bourré de mélodies, d’histoires et de couleurs ».

C’est là que le sens du titre Que ta tête fleurisse toujours prend forme. Cette mise en danger que Mika s’est imposée lui-même, il l’amène aussi en filigrane de ses nouveaux titres. Ils sont imprégnés de liberté, de lâcherpris­e, de « carpe diem » tatoués sur la peau, de prises de risque, d’ouverture, quoi.

« C’est cette idée de résister à la gravité de la vie. Je veux dire, j’aime bien que la vie soit sérieuse, mais pas la manière dont on est éteints par la vie, de temps en temps. Il faut grandir et vieillir sans perdre nos couleurs, et consciemme­nt les accentuer, les exagérer, les cultiver, les faire évoluer. »

Ce qu’il observe plutôt de la société, c’est que celle-ci veut qu’on devienne plus ternes avec les années, elle nous amène à vieillir « gentiment, silencieus­ement ». Sur la pièce C’est la vie, Mika a beau dire que « vieillir est un naufrage », il appelle quand même les auditeurs à demeurer créatifs, « à avoir plus d’empathie pour le monde autour » et à « rester dynamiques ».

Dynamiques, les musiques de Que ta tête fleurisse toujours le sont, et dès le premier morceau, Bougez, un titre qui commande l’action. « On est dans un club, à Amsterdam, à trois heures du matin, avec un texte surréalist­e ! » illustre-t-il. L’approche globale est plutôt variée. Il évoque ici une « approche anglo-saxonne 1960 », différente des airs « embrassés par un soleil des îles, de l’Afrique ou plus tropical ». Avec comme constante que « ça ne cherche pas à être défini par la mode du moment », soutient Mika.

Parlant de mode, le créateur est aussi très impliqué dans tous les aspects visuels de ce projet, pour lequel il a collaboré avec des talents québécois, dont le photograph­e Royal Gilbert. Mika a même mis en place son propre atelier de couture il y a un an, ce qui fait en sorte que ses créations sont uniques et adaptées à la musique.

Mika promet de venir présenter ses nouvelles chansons au Québec, et promeut son spectacle en le qualifiant de « truc dément ». « Je mélange le théâtre visuel, la technologi­e, l’animation avec des objets d’art, il y a des décors presque opératique­s, tout ça mélangé. Même les imprimés de mes costumes sont liés aux chansons ! » De toute évidence, ça fleurit abondammen­t dans la tête de Mika.

J’avais envie de sentir que je ne savais pas ce qui allait se passer, comment j’allais me débrouille­r.

Et la nouveauté est une chose très importante, spécialeme­nt pour quelqu’un comme moi, qui viens d’avoir 40 ans. C’était bien de sentir qu’il y avait quelque chose de neuf.

MIKA

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Le processus de création de ce nouveau disque n’a pas été douloureux, affirme Mika, mais il a fallu près de deux ans et demi pour que celui-ci sente qu’il avait atteint son objectif, soit de livrer un album « vraiment bourré de mélodies, d’histoires et de couleurs ».
UNIVERSAL MUSIC Mika, Island Records Le processus de création de ce nouveau disque n’a pas été douloureux, affirme Mika, mais il a fallu près de deux ans et demi pour que celui-ci sente qu’il avait atteint son objectif, soit de livrer un album « vraiment bourré de mélodies, d’histoires et de couleurs ».
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Que ta tête fleurisse toujours
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