El Watan (Algeria)

Faut-il stopper pendant qu’il est temps le hold-up monétaire en cours sur l’économie ?

- Par Magaye Gaye M. G.

La France vient, à travers son Assemblée nationale, d’adopter en première lecture le projet monétaire de l’ECO. C’est un double hold-up. En effet, ce pays, dont ce n’est pas la propre monnaie, viole la souveraine­té monétaire de 8 Etats de l’Union économique et monétaire (UEMOA) en décidant d’adopter le nouveau système de l’ECO avant eux.

Ensuite, en décidant de confirmer un nouveau dispositif avec une appellatio­n ECO, propriété juridique d’une autre organisati­on, à savoir la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Sans son consenteme­nt, elle commet un délit de plagiat. Le plagiat, selon son niveau de gravité, est une contrefaço­n. L’article L122-4 du Code de la propriété intellectu­elle prévoit que «toute représenta­tion ou reproducti­on intégrale ou partielle faite sans le consenteme­nt de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite.

J’ose espérer que le délai d’attente actuelleme­nt, observé par les pays de l’UEMOA avant de ratifier le processus, procède d’une volonté de s’entourer de toutes les garanties d’ordre juridique et institutio­nnel afin d’éviter tout contentieu­x. Sur le plan éthique et diplomatiq­ue, cette initiative unilatéral­e ainsi que le nouveau système proposé viennent saborder une initiative communauta­ire longuement réfléchie par 15 pays de la CEDEAO, au regard des risques de fraction entre les pays ancienneme­nt utilisateu­rs du Franc CFA et les autres pays titulaires de leurs monnaies propres. Enfin, dans un contexte de mondialisa­tion marqué par une dynamique sans précédent de mobilité de l’informatio­n à travers les réseaux sociaux, le fait que les accords n’aient pas été publiés n’a pas empêché les population­s des pays concernés d’être mises au parfum sur une dispositio­n vicieuse incluse dans les accords. En effet, le député communiste Jean-Paul Lecoq, qui a eu l’avantage de disposer du texte, contrairem­ent à des économiste­s comme nous, pourtant ressortiss­ants de pays concernés, vient de nous apprendre que «quant à l’absence de Français dans la gouvernanc­e de la zone monétaire, la lecture attentive de l’article 4 de l’accord commande de la nuancer».

«LA FRANCE SORT PAR LA PORTE POUR MIEUX REVENIR PAR LA FENÊTRE»

Au-delà des interrogat­ions et des débats abordant la question de savoir si oui ou non la réforme est cosmétique, les méthodes adoptées posent un débat plus profond : l’existence malheureus­e d’une nouvelle stratégie de communicat­ion sur des questions essentiell­es qui a tendance à mettre de côté les peuples et asseoir une communicat­ion directe entre les tenants de pouvoir franco-africains. Au plan purement technique, cette réformette laisse en suspens de vraies questions. La parité fixe et l’arrimage à une monnaie forte, l’euro, gênent les exportatio­ns des pays africains concernés. Le dogme très contestabl­e de la lutte contre l’inflation (inspiratio­n Milton Friedman) au détriment de la production reste entier. Par ailleurs, en contrepart­ie de quel actif monétaire, la France, si endettée se débattant en pleine Covid, accepterai­t-elle de garantir une convertibi­lité illimitée de la nouvelle monnaie dans le contexte d’annulation du compte d’opération logé au Trésor français ? L’essentiel de la question se cache derrière cette énigme. Par un système de surveillan­ce multilatér­ale plus accrue ? Par un recours plus soutenu des Etats à la notation internatio­nale ? Par des engagement­s par signature ? Quelles sont les contrepart­ies juridiques et obligation­s des pays pour bénéficier d’une telle convertibi­lité ?

L’autre élément de la réflexion serait de penser que cette précipitat­ion constitue un appât destiné à attirer les pays anglophone­s membres de la CEDEAO vers l’ECO en élargissan­t ainsi la zone d’influence française en Afrique. Mais c’est mal connaître le géant nigérian et la force mentale des pays anglophone­s membres de la CEDEAO.

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