Une célébration nationale malgré quelques «résistances»
Des festivités ont été organisées à travers toutes les régions du pays à l’occasion de Yennayer, le Nouvel An amazigh, malgré les «restrictions» imposées par les autorités pour faire face au risque de propagation de la Covid-19. Si les Algériens le fêtent depuis longtemps, son «officialisation» en 2018 a fait qu’il soit pris en charge par les autorités, à différents niveaux, d’où l’organisation de tous types de festivités, notamment dans les établissements scolaires. Ceci en plus bien évidemment des voeux adressés par les plus hauts responsables du pays, dont le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, aux Algériens. Chose qui apparemment a dérangé certains cercles, notamment islamistes, qui essaient à chaque fois de «parasiter» sa célébration par fatwas interposées, ce qui ne semble pas avoir de l’effet sur le terrain.
Ainsi, ce 12 janvier 2021, troisième année de sa célébration d’une manière officielle, plusieurs festivités ont été organisées à l’échelle nationale. Que ce soit à Médéa, Tlemcen, Béjaïa, Ouargla ou Chlef, pour ne citer que ces wilayas, les autorités locales ont tenu à marquer l’événement en prévoyant surtout des expositions pour faire connaître la dimension amazighe du pays. Tout ceci, bien entendu, a bénéficié d’une large couverture des médias publics, contrairement à un passé pas trop lointain où Yennayer était relégué à un fait divers qui n’était accessoirement médiatisé – lorsqu’il l’était bien sûr – que pour évoquer le plat autour duquel se réunissent les familles algériennes, sans s’en référer à la dimension identitaire de la question. A noter, par contre, que, situation sanitaire oblige, le climat est différent cette fois-ci, par rapport à l’année passée avec le hirak qui, à travers plusieurs wilayas, et pas seulement celles où la revendication amazighe était portée, avaient tenu à marquer l’événement. Le slogan ««Asseguas amegaz, el hirak rahou labass» (Le hirak va bien) avait retenti un peu partout.
Quoi qu’il en soit, Yennayer a de tous temps été lié à la revendication amazighe. Le consacrer en tant que «journée chômée et payée» a été réclamé par des militants des années durant. Fêté, fautil le rappeler, par les Algériens des différentes régions du pays, même si dans certains cas cela n’avait pas de portée identitaire, c’est finalement le 27 décembre 2017, que l’ancien président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a décidé d’en faire une «fête nationale et officielle», satisfaisant ainsi une demande longtemps formulée par les défenseurs de la cause amazighe. La publication du texte au Journal officiel s’est faite en août 2018.
C’est à partir de là que «Yennayer», coïncidant avec le 12 janvier, est devenu une «journée chômée et payée». La revendication amazighe a connu donc plusieurs avancées depuis les années 1990. En 1995, après une année de boycott scolaire en Kabylie, l’enseignement de tamazight dans les écoles a été instauré, en plus de la mise sur pied du Haut commissariat à l’amazighité (HCA). C’était sous la présidence de Liamine Zéroual. Sept année plus tard, en 2002 plus précisément, alors que Bouteflika avait accédé au pouvoir trois ans plus tôt, tamazight est consacré langue nationale. C’était une année après les événements tragiques de 2001, communément appelés le «printemps noir» où 127 jeunes ont été tués. Par la suite, il a fallu attendre 14 ans, soit en 2016, pour que tamazight devienne «langue nationale et officielle», alors que quatre année plus tard, en novembre 2020, ce statut (nationale et officielle) est désormais «intangible» dans la nouvelle Constitution confectionnée par l’actuel président, Abdelmadjid Tebboune. Tous ceci pour dire que l’évolution qu’a connue la question identitaire n’a été possible qu’après un long combat. Au-delà des festivités «officielles», ce sont les avancées enregistrées dans la société qui sont à relever, même si de temps à autre, certaines voix, sans réelle portée au sein de la population, continuent de tenter de remettre en cause ces acquis. Dans tous les cas de figure, Yennayer est désormais fêté à travers tout le pays et d’une manière officielle, consacrant ainsi la dimension amazighe du pays.