Frictions entre Washington et Moscou
Alors que le président américain Joe Biden sera investi le 20 janvier, Washington et Moscou se sont livrés à des joutes qui ne vont pas dans
le sens de l’amélioration des relations entre les deux pays
Concernant la question du changement à la tête des Etats-Unis et (le fait) que ça puisse devenir plus difficile pour nous, je ne le crois pas, je crois que ce sera comme à l’accoutumée.» C’est ce qu’a déclaré le président russe, Vladimir Poutine, hier au cours d’une réunion avec des responsables russes, selon des propos recueillis par l’AFP. Comme il a appelé à poursuivre le développement des capacités économiques et militaires de la Russie pour faire face «aux difficultés et aux menaces». Les déclarations du maître du Kremlin interviennent à moins d’un mois de la prise de fonction du président élu américain Joe Biden.
Quelques heures plus tôt, dans un entretien à l’agence de presse Interfax, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, chargé notamment des relations avec les Etats-Unis, a indiqué que la Russie n’attend «rien de bon» du futur président américain. Et d’ajouter : «Ce serait étrange d’attendre du bien de gens qui, pour beaucoup d’entre eux, ont fait leur carrière sur la russophobie, en déversant du fiel sur mon pays.» De son côté, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a souligné le même jour ne voir «rien de positif» se profiler.
Mardi, le président élu, Joe Biden, a promis de que la cyberattaque attribuée à la Russie, qui a visé des agences gouvernementales aux Etats-Unis, ne restera pas «sans réponse». Il a demandé que des «décisions importantes» soient prises contre les responsables afin qu’ils «rendent des comptes». Il n’a pas manqué de critiquer l’attitude du président Donald Trump à l’égard de cette cyberattaque découverte le 13 décembre. «Cette attaque a eu lieu sous la surveillance de Donald Trump, alors qu’il ne regardait pas», a déclaré le futur locataire de la Maison-Blanche. Il a affirmé qu’il mettrait tous les moyens en oeuvre pour sécuriser le cyberespace de son pays même si cela lui coûtera «des milliards de dollars».
DES QUESTIONS À RÉGLER LE PLUS VITE POSSIBLE
Washington a accusé Moscou d’avoir initié cette cyberattaque. «C’était une entreprise très importante, et je crois que nous pouvons maintenant dire assez clairement que ce sont les Russes qui se sont engagés dans cette activité», a affirmé vendredi le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo. De son côté, Moscou a démenti les accusations de Washington. Samedi, le président américain est sorti de son silence et a minimisé cette cyberattaque et le rôle supposé de la Russie. «La cyberattaque est bien plus importante dans les médias Fake News qu’en réalité», a tweeté le président américain. «Tout est sous contrôle. Russie ( ) c’est le slogan prioritaire quand n’importe quelle chose arrive.» Et d’ajouter : «Cela pourrait être la Chine (c’est possible !)» Lundi, le ministre de la Justice, Bill Barr, a une nouvelle fois contredit le Président sortant, estimant que Moscou est derrière l’opération. Washington a pris des sanctions contre la
Russie, notamment du fait de piratages informatiques et d’accusations d’ingérence dans la présidentielle de 2016.
Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a qualifié hier les récentes mesures américaines visant des entreprises russes et chinoises de «politique hostile des Etats-Unis», promettant «une réplique».
Ces derniers échanges de propos hostiles interviennent alors que Moscou et Washington ont plusieurs questions à régler dès la prise de fonction de J. Biden, le 20 janvier. Parmi ces dossiers, le renouvellement ou non du traité de désarmement New Start qui expire en février, dernier grand accord bilatéral régissant une partie des arsenaux nucléaires des deux adversaires géopolitiques. Autre question : le sauvetage de l’accord sur le nucléaire iranien. Les signataires comptent sur Joe Biden pour revenir à ce texte comme il l’a promis, après le retrait américain décidé par l’administration Trump. Sachant que Téhéran s’éloigne de plus en plus de ses engagements. Pour S. Riabkov, la Russie doit avoir un «dialogue sélectif» avec les Etats-Unis, en ciblant uniquement les «sujets qui nous intéressent».
Pour le reste, il a estimé nécessaire une politique «d’endiguement total des Etats-Unis» et exclu que la Russie initie le contact «avec l’équipe de transition de Biden». Le président Vladimir Poutine a déjà laissé entendre que le changement de locataire de la MaisonBlanche ne laisse pas présager de détente. Il a été l’un des rares dirigeants au monde à avoir attendu le vote du collège électoral américain du 14 décembre pour féliciter le Président élu arguant du refus de Donald Trump de reconnaître sa défaite. Amnay Idir