Les économies émergentes et en développement dans le rouge
L’économie mondiale reste plus que jamais à la merci de la pandémie. La récession va être moins sévère que prévu en 2020, grâce à un été d’insouciance dans beaucoup de pays avancés, «mais la reprise s’essouffle déjà», a prévenu hier le Fonds monétaire international (FMI). En Europe, la France, l’Espagne et l’Angleterre, qui font face à une nouvelle vague d’infections, multiplient les mesures ciblées pour éviter un confinement généralisé dévastateur pour l’économie.
Le FMI table désormais sur une contraction du produit intérieur brut (PIB) mondial de 4,4% cette année contre 5,2% estimé en juin, rapporte l’AFP. La révision pour cette année reflète des données économiques meilleures que prévu au deuxième trimestre, principalement dans les pays avancés – Europe et EtatsUnis – mais aussi en Chine.
Et elle s’est poursuivie au troisième trimestre dans la première économie mondiale (Etats-Unis), malgré une vague d’infections. Selon les données rendues publiques, «toutes les régions du monde sont concernées par cette amélioration, exception faite des économies émergentes et en développement, dont la prévision a été abaissée à -3,3%». Le PIB des Etats-Unis va plonger de 4,3% contre 8% estimé précédemment, celui de la zone euro va chuter de 8,3%, celui de la France de 9,8%. «Pour autant, cette crise est loin d’être terminée», a souligné l’économiste en chef Gita Gopinath. Face à l’immense incertitude, l’institution de Washington a une nouvelle fois révisé en baisse le rythme de la reprise attendue l’an prochain (+5,2%, -0,2 point). Et si l’on exclut la Chine, deuxième économie mondiale, «le PIB mondial cumulé entre 2020 et 2021 est négatif», a-t-elle précisé lors d’une conférence de presse. «L’ascension sera probablement longue, inégale et incertaine», a résumé l’économiste, citée par l’AFP, soulignant que depuis les prévisions de juin, «les perspectives se sont considérablement détériorées dans certains pays émergents et en développement, où les infections augmentent rapidement». Après la contraction historique en 2020 et la reprise en 2021, le niveau du PIB mondial ne devrait être au final que très légèrement supérieur à celui de 2019, détaille le FMI. La même source indique qu’à moyen terme, les perspectives sont aussi moroses, puisque la distanciation sociale persistera probablement jusqu’à fin 2022, empêchant un véritable rebond économique. Gita Gopinath a souligné que «pour un grand nombre de pays», le retour aux niveaux pré-pandémiques interviendra «très progressivement», pas avant 2022 pour certains et même pas avant 2023 pour l’Amérique latine. De plus, le FMI n’exclut pas un scénario du pire avec une intensification des vagues d’infections combinée à un ralentissement des progrès sur les traitements et les vaccins, obligeant les autorités à des mesures plus draconiennes.
Dans ce contexte, remettre l’économie mondiale sur la trajectoire prévue avant la pandémie est compromis. Le FMI estime que la perte cumulée de PIB pour la période 2020-2025 serait de 28 000 milliards de dollars, dont 11 000 milliards pour 2020-2021. «C’est un sérieux revers à l’amélioration du niveau de vie» dans tous les pays, a réagi Gita Gopinath. Selon le dernier rapport de la Banque mondiale, le double choc de la pandémie et de l’effondrement des cours du pétrole a exacerbé les problèmes structurels sous-jacents des pays de la région MENA et touché tous les aspects de leurs économies. La pandémie, affirme l’institution financière internationale, a creusé les inégalités déjà présentes dans la région, exposant les vulnérabilités des systèmes sociaux, politiques et économiques, ce qui contribue à amplifier les effets de la pandémie elle-même. Son coût pourrait se chiffrer à environ 3,7% du PIB régional de 2019, soit quelque 100 milliards de dollars.